12.3.07

Diables tordus


... de la forêt de Verzy. On les croyait disparus, brûlés comme des sorcières au Moyen-Âge. Ils ressurgissent, résistent en Champagne. Mais pourquoi ces arbres poussent-ils tordus ?
Comment grandit un arbre ? Par ses bourgeons. Dans l'axe de chaque branche, un bourgeon apical donnera la pousse de l'été, les nouvelles cellules de l'arbre. Pour les hêtres tortillards, ou faux, ou fous, la règle de l'axe n'est pas respectée. Le nouvelle pousse part dans une direction aléatoire, puis est orientée par l'éclairage, ce qui rattrape un peu les choses. Car à force de croître en tous sens, les branches tortillardes se retrouvent en porte à faux et brisent. En amont de la rupture une nouvelle branche devient alors maîtresse, qui repart, elle, plus belle. L'étrange structure qui en résulte peut être mise en équation, elle respecte les lois mathématiques du chaos, comme le trait d'une côte, le parasol des artères irriguant un cerveau, la dispersion des bras du delta d'un fleuve. Mais ce qui cause cette particularité des faux des Verzy, ou de ceux, récemment découverts, du Massif Central demeure inacessible. Est-ce-génétique ? Environnemental ? Les graines des faux donnent soit des arbres normaux, ou des tordus, ce qui plaide pour la génétique. On aime le hêtre, dont l'écorce est sensée guérir. Mais on redoute/adore le tordu. Compliqués, les hommes, lorsque par l'inhabituel ils se trouveent bousculés.

De ce hêtre au feuillage sombre/J'entends frissonner les rameaux:/On dirait autour des tombeaux/Qu'on entend voltiger une ombre./Tout à coup, détaché des cieux,/Un rayon de l'astre nocturne,/Glissant sur mon front taciturne,/Vient mollement toucher mes yeux. (Lamartine : Premières méditations poétiques).
Un tortillard se tordait de plus belle au sud de Domrémy, au "Bois Chenu", tout près de la Bonne Fontaine aux Fées. Celui-là était l'objet d'un culte: une procession s'y rendait un dimanche de carême et parfois avant l'Ascension. Pour chasser les esprits malins, il semble. Lors du procès de réhabilitation de Jeanne (d'Arc) (1450-1456), 11 témoins évoquent ce fau comme s'il s'agissait d'une information capitale. N'aurait-il pas influencé la pucelle, orienté son destni, insufflé en elle un peu de magie ? (G. Parent, Les Hêtres tortillards, Fagus sylvatica L. var. tortuosa Pépin, de Lorraine, dans leur contexte européen. Travaux scientifiques du Musée national d’histoire naturelle Luxembourg, 2006).

Voir ici : Chaos Trees © Olivier Blaise

1 commentaire:

(.) a dit…
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