C'est Rouge et sang. Large. Fait avec de la toile et du vent. Secoué de calmes et de tempêtes. On s'assoit devant. On ne voit rien, puisque l'oeil est aussi perdu que s'il arrivait dans un monde inconnu, aux formes non référencées, ni apprises au biberon.
Faut-il être inquiet ? Rassuré ?
On hésite. Va et revient.
Peu a peu cela se glisse en vous. Devient comme vous. Et vous comme lui, le "chose".
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Une histoire vient se proposer à vos pieds. Les vagues de vent se font fortes. Des créatures descendent du ciel et narguent le Rouge. D'autres sont dessous, dans cette lave qui enfin respire.
Cela s'appelle Casino.
C'est une oeuvre d'Annette Messager, exposée à Beaubourg jusqu'au 17 septembre.
C'est à voir, comme tout le reste de ce travail qui vous emporte loin et loin.
21h00. Fermeture.
Il aura fallu que les gardiens viennent nous dire dix fois de partir.
30.6.07
29.6.07
Le silence des livres
Hier le jeune auteur que je suis a eu ses premiers contacts, petits messages, téléphone, avec des libraires. De "vrais" libraires. Comme je les vois, dans mon carrousel des images : en province, de petites échoppes joyeuses et claires, où les livres voyagent de la main à la main, dans une sorte de calme affection.
Alors c'est revenu en moi.
Le bruit du camion, en double file, moteur au ralentit.
L'embouteillage et les Klaxons.
Les cartons sur le diable rouge dans la rue Kuhn, à Strasbourg, celle qui court à la gare.
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Le "dzing-tchak" des ficelles que l'on coupe avec la vieille lame au manche brisé, entouré d'adhésif, mais qui tranche comme une baïonnette. Le raclement des cartons qui s'ouvrent. Et cette odeur ! Un peu de ce parfum de papier et de mystère, humide et doux, de l'étrange pays où naissent les livres.
Mon père, la tête au labeur, coupait, ouvrait. En sueur, avec son mauvais poumon qui sifflait, il me passait les livres.
Les piles s'élevaient sur le comptoir, par colonnes de rêves et de désirs.
Là ma soeur et ma mère comptaient, pointaient les commandes et alignaient les héros sur les rayons.
Il y avait de tout, de Villiers à Perec, de Verne à Gary, Bob Morane et aussi Winnetou.
On restait sérieux, mais en nous, c'était Noël. L'arrivée des livres, c'était toujours du futur et des promesses.
Moi ? De mon père aux femmes, j'étais la noria. Je portais sur mes bras. Si mal. Je traînais, lisais en coin les quatrièmes de couvertures. Repérais les trésors que j'allais cacher sous mes draps dès le soir. Parfois, souvent, je n'y tenais plus. Sans entendre les remontrances je filai dans l'arrière boutique, m'asseyais sur le meuble de métal, et commençais à dévorer ce nouvel album, cet énorme Dumas illustré dont les coins s'enfonçaient dans mes cuisses laissées nues par la culotte. Et les mots, par équipages, par cordées et par caravanes, entraient dans ma tête.
Ce que je ne comprenais pas, dans toute cette bousculade, c'était le silence de mon père.
Mais cela est une si longue et autre histoire.
Alors c'est revenu en moi.
Le bruit du camion, en double file, moteur au ralentit.
L'embouteillage et les Klaxons.
Les cartons sur le diable rouge dans la rue Kuhn, à Strasbourg, celle qui court à la gare.
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Le "dzing-tchak" des ficelles que l'on coupe avec la vieille lame au manche brisé, entouré d'adhésif, mais qui tranche comme une baïonnette. Le raclement des cartons qui s'ouvrent. Et cette odeur ! Un peu de ce parfum de papier et de mystère, humide et doux, de l'étrange pays où naissent les livres.
Mon père, la tête au labeur, coupait, ouvrait. En sueur, avec son mauvais poumon qui sifflait, il me passait les livres.
Les piles s'élevaient sur le comptoir, par colonnes de rêves et de désirs.
Là ma soeur et ma mère comptaient, pointaient les commandes et alignaient les héros sur les rayons.
Il y avait de tout, de Villiers à Perec, de Verne à Gary, Bob Morane et aussi Winnetou.
On restait sérieux, mais en nous, c'était Noël. L'arrivée des livres, c'était toujours du futur et des promesses.
Moi ? De mon père aux femmes, j'étais la noria. Je portais sur mes bras. Si mal. Je traînais, lisais en coin les quatrièmes de couvertures. Repérais les trésors que j'allais cacher sous mes draps dès le soir. Parfois, souvent, je n'y tenais plus. Sans entendre les remontrances je filai dans l'arrière boutique, m'asseyais sur le meuble de métal, et commençais à dévorer ce nouvel album, cet énorme Dumas illustré dont les coins s'enfonçaient dans mes cuisses laissées nues par la culotte. Et les mots, par équipages, par cordées et par caravanes, entraient dans ma tête.
Ce que je ne comprenais pas, dans toute cette bousculade, c'était le silence de mon père.
Mais cela est une si longue et autre histoire.
28.6.07
Quelle taille pour Lucifer ?
"Et une ombre, au sac blanc portant l'enseigne azur d'une truie grosse de petits (note : armoiries d'une famille d'usuriers de Padoue), me dit : "que fais-tu, toi, dans cette fosse ?" (Enfer, XVII, 64)
L'Enfer. En parler comme Dante, le calculer comme Galilée. Il est en effet amusant de sortir des grimoires le souvenir que de grands scientifiques, comme Galilée excusons du peu, se soient "amusés" à calculer la forme, le volume, et la résistance des matériaux nécessaires à un bon Enfer... Ne m'étonnerait pas, au passage, que Verne, Jules, soit tombé sur de si charmantes élucubrations pour imaginer son Voyage au centre de la Terre.
photo
L'affaire est croquée, analysée et commentée par cet infatigable explorateur qu'est le physicien Jean-Marc Lévy-Leblond dans son ouvrage "La vitesse de l'ombre" (Seuil, 2006) et développée dans le numéro de mai 2007 d'Europe (revue littéraire mensuelle).
Pour tenter de chiffrer à quoi pouvait bien correspondre l'Enfer, le jeune Galilée, impatient d'épater ses collègues et son audience, commence dans sa publication intitulée "Deux leçons sur la forme, le site et la grandeur de l'Enfer de Dante" (1587) par annoncer qu'il le visitera sur les seuls pas de Dante.
L'Enfer, pour le mathématicien de Pise âge dé 24 ans, est alors une cavité conique dont le sommet est au centre de la Terre et dont l'axe, bien entendu, passe par Jérusalem. Le cercle qui dessine la base du cône possédant un diamètre égal au rayon de la Terre. C'est qu'il fallait de la place, tout de même, pour héberger toutes ces âmes fautives.
Galilée estime le volume de l'Enfer à la quatorzième partie de la Terre. C'est moins que cela, rectifie-t-il. Car bien entendu, pour tenir le plafond de cette immense cave, l'écorce terrestre, doit faire au moins la huitième partie du rayon. Une voûte comparable à celles des maçonneries des églises d'alors, du Dome de Florence de Brunelleschi en particulier, permettant de si élégantes extrapolations de résistance des matériaux.
Il s'agit toutefois d'une erreur. Car au passage, Galilée "oublie" que les efforts n'augmentent pas comme la dimension des objets, mais comme leur volume. Par la suite, dans sa carrière, il corrigera cette manière de voir.
L'exercice étant surtout de style, on s'amuse encore de croiser son estimation de l'angle que doivent faire les gradins, parallèles aux rayons de la sphère de la Terre, ou son calcul de la taille de Lucifer, à partir d'une statue située dans une cour du Vatican. Dante précisant en outre que la moitié du corps de l'ange se dresse hors des glaces. Galilée trouve un monstre de 2000 brasses, soit environ 3.600 mètres de haut. Bigre.
L'Enfer. En parler comme Dante, le calculer comme Galilée. Il est en effet amusant de sortir des grimoires le souvenir que de grands scientifiques, comme Galilée excusons du peu, se soient "amusés" à calculer la forme, le volume, et la résistance des matériaux nécessaires à un bon Enfer... Ne m'étonnerait pas, au passage, que Verne, Jules, soit tombé sur de si charmantes élucubrations pour imaginer son Voyage au centre de la Terre.
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L'affaire est croquée, analysée et commentée par cet infatigable explorateur qu'est le physicien Jean-Marc Lévy-Leblond dans son ouvrage "La vitesse de l'ombre" (Seuil, 2006) et développée dans le numéro de mai 2007 d'Europe (revue littéraire mensuelle).
Pour tenter de chiffrer à quoi pouvait bien correspondre l'Enfer, le jeune Galilée, impatient d'épater ses collègues et son audience, commence dans sa publication intitulée "Deux leçons sur la forme, le site et la grandeur de l'Enfer de Dante" (1587) par annoncer qu'il le visitera sur les seuls pas de Dante.
L'Enfer, pour le mathématicien de Pise âge dé 24 ans, est alors une cavité conique dont le sommet est au centre de la Terre et dont l'axe, bien entendu, passe par Jérusalem. Le cercle qui dessine la base du cône possédant un diamètre égal au rayon de la Terre. C'est qu'il fallait de la place, tout de même, pour héberger toutes ces âmes fautives.
Galilée estime le volume de l'Enfer à la quatorzième partie de la Terre. C'est moins que cela, rectifie-t-il. Car bien entendu, pour tenir le plafond de cette immense cave, l'écorce terrestre, doit faire au moins la huitième partie du rayon. Une voûte comparable à celles des maçonneries des églises d'alors, du Dome de Florence de Brunelleschi en particulier, permettant de si élégantes extrapolations de résistance des matériaux.
Il s'agit toutefois d'une erreur. Car au passage, Galilée "oublie" que les efforts n'augmentent pas comme la dimension des objets, mais comme leur volume. Par la suite, dans sa carrière, il corrigera cette manière de voir.
L'exercice étant surtout de style, on s'amuse encore de croiser son estimation de l'angle que doivent faire les gradins, parallèles aux rayons de la sphère de la Terre, ou son calcul de la taille de Lucifer, à partir d'une statue située dans une cour du Vatican. Dante précisant en outre que la moitié du corps de l'ange se dresse hors des glaces. Galilée trouve un monstre de 2000 brasses, soit environ 3.600 mètres de haut. Bigre.
26.6.07
Plus fort que la force
Que la force soit avec toi...
Merci Lucas. Depuis que cette phrase s'est déversée sur les salles obscures de la planète, encore et encore, pour toute une génération subissant les épisodes de Starwars, le mot de "force" a pris une connotation "druidique". La glu de l'univers, toujours sur ton dos, quoi...
Le plus amusant, c'est que les physiciens ignorent au fond ce qu'est une force. Restons calme, disons sa "nature" profonde. Pour un savant, en effet une force = une action capable de créer une une modification du comportement d'un objet. Elle est représentée par un vecteur pour donner son sens et sa direction, mais elle ne dit rien de "pourquoi" cela bouge. A quelle "intention" du monde cela correspond.
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Les pierres mouvantes de la Vallée de la mort. Leur reptation a longtemps constitué un mystère. On sait à présent comment agissent les grains et les écarts de température pour mettre ces masses en mouvement.
Cette cause profonde des forces tracassa toute sa vie Newton, qui comprenait bien que les pommes tombaient des arbres sous l'effet de la même chose qui faisait chuter la Lune vers la Terre (mais comme elle tourne à la même vitesse qu'elle tombe, elle reste là-haut), mais s'arrachait les tifs de ne pas entrevoir la mystérieuse "source" de cette force. Einstein, plus raisonnable, a renoncé à pourchasser ce "pourquoi". Il a juste constaté : "c'est comme ça, hein..."
Bref, On ne sait pas.
Mais je vous livre cet autre secret de la cambuse scientifique, souligné par Asimov, dans plusieurs de ses oeuvres.
L'homme a, dans la nature, "repéré" quatre forces :
- nucléaire forte (la colle minuscule, entre les parties du noyau de l'atome, protons et neutrons)
- électromagnétique (entre deux particules à charges électriques. La force des boussoles et des aimants)
- nucléaire faible (responsable de la désintégration des atomes)
- gravitationnelle (attirant les objets, à notre échelle qui nous fait nous écorcher les genoux quand nous sommes gamins et nous maintient autour du soleil)
Maintenant, le lapin qui sort du chapeau. Savez vous quels sont les ordres de grandeur de ces forces repérées par l'homme à travers l'infiniment petit et grand ? Non ?
Voici (dans le même ordre) :
- 1000
- 1
- 0,00000000001 (10 exp -11)
- 0,000000000000000000000000000000000000001 (10 exp -39)
Bref, la force qui nous cloue au sol est des milliards de milliards de milliards de milliards de fois plus faible que celle qui attire la limaille de fer sur l'aimant ou fait fonctionner votre ordinateur. Pas mal, non ?
Bon pour les forces nucléaires (le nombre 1000), avec Hiroshima, on se doutait déjà que c'était plus énorme que l'impact d'un grain de riz sortant d'une sarbacane de collégien...
Merci Lucas. Depuis que cette phrase s'est déversée sur les salles obscures de la planète, encore et encore, pour toute une génération subissant les épisodes de Starwars, le mot de "force" a pris une connotation "druidique". La glu de l'univers, toujours sur ton dos, quoi...
Le plus amusant, c'est que les physiciens ignorent au fond ce qu'est une force. Restons calme, disons sa "nature" profonde. Pour un savant, en effet une force = une action capable de créer une une modification du comportement d'un objet. Elle est représentée par un vecteur pour donner son sens et sa direction, mais elle ne dit rien de "pourquoi" cela bouge. A quelle "intention" du monde cela correspond.
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Les pierres mouvantes de la Vallée de la mort. Leur reptation a longtemps constitué un mystère. On sait à présent comment agissent les grains et les écarts de température pour mettre ces masses en mouvement.
Cette cause profonde des forces tracassa toute sa vie Newton, qui comprenait bien que les pommes tombaient des arbres sous l'effet de la même chose qui faisait chuter la Lune vers la Terre (mais comme elle tourne à la même vitesse qu'elle tombe, elle reste là-haut), mais s'arrachait les tifs de ne pas entrevoir la mystérieuse "source" de cette force. Einstein, plus raisonnable, a renoncé à pourchasser ce "pourquoi". Il a juste constaté : "c'est comme ça, hein..."
Bref, On ne sait pas.
Mais je vous livre cet autre secret de la cambuse scientifique, souligné par Asimov, dans plusieurs de ses oeuvres.
L'homme a, dans la nature, "repéré" quatre forces :
- nucléaire forte (la colle minuscule, entre les parties du noyau de l'atome, protons et neutrons)
- électromagnétique (entre deux particules à charges électriques. La force des boussoles et des aimants)
- nucléaire faible (responsable de la désintégration des atomes)
- gravitationnelle (attirant les objets, à notre échelle qui nous fait nous écorcher les genoux quand nous sommes gamins et nous maintient autour du soleil)
Maintenant, le lapin qui sort du chapeau. Savez vous quels sont les ordres de grandeur de ces forces repérées par l'homme à travers l'infiniment petit et grand ? Non ?
Voici (dans le même ordre) :
- 1000
- 1
- 0,00000000001 (10 exp -11)
- 0,000000000000000000000000000000000000001 (10 exp -39)
Bref, la force qui nous cloue au sol est des milliards de milliards de milliards de milliards de fois plus faible que celle qui attire la limaille de fer sur l'aimant ou fait fonctionner votre ordinateur. Pas mal, non ?
Bon pour les forces nucléaires (le nombre 1000), avec Hiroshima, on se doutait déjà que c'était plus énorme que l'impact d'un grain de riz sortant d'une sarbacane de collégien...
25.6.07
Cyclope des années 40.000
Ce soir, avec un groupe de camarades, nous avons traversé le musée Dupuytren, de l'Ecole de médecine, à Paris. Quel décor ! Des jolies boiseries et des grimoires. Des étagères. Des bocaux. Et tapis derrières les étiquettes inscrites à la plume vers 1850, des "monstres". Des créatures difformes alignées par familles : becs de lièvres, crânes bourgeonnants, cerveaux ramollis, tumeurs, pour apprendre au médecins à mieux reconnaitre nos pathologies. La différence, l'exception, au coeur de la médecine comparative. Les femmes enceintes de notre groupe ont fait demi-tour.
Depuis "Elephant Man", la différence ne me fait plus peur. Vacciné. Rassuré de cette fragilité. Ce qui m'horrifie, c'est que l'on s'émeuve de la "laideur" et que l'on admire la beauté avec cette béatitude manipulée.
photo
Ce qui m'a arrêté, c'est le cyclope.
L'oeil ouvert, l'air ravi, le petit gnome joyeux nous fixait.
L'holoproencéphalie existe à des degrés divers et résulte en une séparation incomplète entre les deux hémisphères du cerveau et entre les deux yeux. Peu viable. Retard mental. Une sur 20.000 naissances, à l'époque où le dépistage prénatal n'existait pas.
Dans son bocal,le cyclope blanc n'avait rien d'une horreur. Il était un impossible. Une tentative d'autre humain. Voie sans issue. "C'est un mystère, disait notre guide, 80 % des enfants viennent au monde avec une malformation mineure, presque toujours rectifiable... Mais la plupart d'entre nous, pour une raison ou une autre, auraient leur place sur ces étagères" Je me suis dit que nous n'avions pas fini d'évoluer. Que j'étais curieux de connaitre la tête de l'humain des années 40.000. Ressemblera-t-il à Hal, dans 2001 l'Odyssée de l'espace ?
"O Cyclope, Cyclope ! où tes esprits s'en vont-ils ? Si tu tressais des corbeilles et coupais du feuillage pour tes jeunes brebis, peut-être ton intelligence n'en irait-elle que mieux. Jouis des biens présents ; pourquoi poursuivre ce qui te fuit ? Tu trouveras une autre Galatée, et même plus belle. Plusieurs belles jeunes filles m'excitent à jouer avec elles [pour la nuit], et rient aux éclats quand je les écoute. Je suis donc aussi quelque chose sur la terre ! (72-79)"
(Galatée et le Cyclope, Théocrite de Syracuse)
Depuis "Elephant Man", la différence ne me fait plus peur. Vacciné. Rassuré de cette fragilité. Ce qui m'horrifie, c'est que l'on s'émeuve de la "laideur" et que l'on admire la beauté avec cette béatitude manipulée.
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Ce qui m'a arrêté, c'est le cyclope.
L'oeil ouvert, l'air ravi, le petit gnome joyeux nous fixait.
L'holoproencéphalie existe à des degrés divers et résulte en une séparation incomplète entre les deux hémisphères du cerveau et entre les deux yeux. Peu viable. Retard mental. Une sur 20.000 naissances, à l'époque où le dépistage prénatal n'existait pas.
Dans son bocal,le cyclope blanc n'avait rien d'une horreur. Il était un impossible. Une tentative d'autre humain. Voie sans issue. "C'est un mystère, disait notre guide, 80 % des enfants viennent au monde avec une malformation mineure, presque toujours rectifiable... Mais la plupart d'entre nous, pour une raison ou une autre, auraient leur place sur ces étagères" Je me suis dit que nous n'avions pas fini d'évoluer. Que j'étais curieux de connaitre la tête de l'humain des années 40.000. Ressemblera-t-il à Hal, dans 2001 l'Odyssée de l'espace ?
"O Cyclope, Cyclope ! où tes esprits s'en vont-ils ? Si tu tressais des corbeilles et coupais du feuillage pour tes jeunes brebis, peut-être ton intelligence n'en irait-elle que mieux. Jouis des biens présents ; pourquoi poursuivre ce qui te fuit ? Tu trouveras une autre Galatée, et même plus belle. Plusieurs belles jeunes filles m'excitent à jouer avec elles [pour la nuit], et rient aux éclats quand je les écoute. Je suis donc aussi quelque chose sur la terre ! (72-79)"
(Galatée et le Cyclope, Théocrite de Syracuse)
La danse de l'éléphant rose
La piste rouge traverse le bush comme une coupure. Rectiligne. Avec "Kob", notre ranger, perchés sur le 4x4, nous filons le train à l'éléphant. Filer le train est le terme précis. A distance bien respectueuse, au ralenti, avec pour tout paysage son odeur, ses énormes fesses, sa queue et ses oreilles battantes.
Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi l'éléphant semble aussi énervé et ne marche pas droit. Il louvoie sur ce facile chemin, allant d'un bord à l'autre, écrasant buissons et arbustes.
Devant ma surprise, Kob est hilare.
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- Quoi ?
Il rit plus encore, plié sur le volant.
- Oh ? Qu'est-ce que je ne comprends pas ?
- Rien, c'est samedi soir, pour lui.
- Samedi soir ?
Il essuie une larme :
- Oui... Tu sais bien, il a picolé...
C'est ainsi que le long du Krüger Park, en Afrique du Sud, j'appris que les animaux sauvages sont adeptes de l'alcool. Non, ils ne l'achètent pas par packs de 24. C'est dans les fruits trop murs ou par les moissons fermentées, qu'ils ingurgitent par quintal, que les pachydermes dénichent leur ivresse.
Pour en savoir davantage, sous la houlette du psychologue Ronald K. Siegel, de l'université de Californie, une équipe de chercheurs a parcouru l'Afrique, l'Amérique du Sud, l'Asie tropicale et l'Océanie. Et recensé près de 2 000 cas de mammifères, oiseaux, reptiles et même insectes - adeptes de l'alcool et autres drogues "naturelles" (haschich des efflorescences du chanvre indien, opium des fruits du pavot, cocaïne de la coca, etc.).
Les chercheurs se sont en particulier intéressés à l'éléphant. On raconte des histoires de troupeaux joyeux, piétinant des dépôts de céréales ou se roulant dans des tapis de fruits fermentés. Rendus ensuite "bizarres" par l'alcool, ils déferlent parfois ensuite sur les villages, et aplatissent tout au passage.
Ne reculant devant rien, l'équipe de Siegel s'est livrée à une série d'expériences dans un parc de Californie. Ce qui a permis de constater que c'est à une concentration de sept degrés par litre que les pachydermes apprécient le mieux l'alcool.
Le chercheur en déduit que les animaux ont davantage qu'une simple "consommation opportuniste". A son avis les éléphants s'enivrent intentionnellement de manière à apaiser leurs souffrances ou le stress de leur vie quotidienne, exactement comme le feraient les humains. Une idée qui s'appuie sur le constat qu'en situation de stress (surpopulation) les pachydermes consomment davantage de fruits alcoolisés...
Etrange et "morale" conclusion. Pourquoi les éléphants n'auraient-ils pas simplement du "plaisir" a se sentir plus "légers" et à partager cette sensation, comme nous autres dans les bars à bière ?
Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi l'éléphant semble aussi énervé et ne marche pas droit. Il louvoie sur ce facile chemin, allant d'un bord à l'autre, écrasant buissons et arbustes.
Devant ma surprise, Kob est hilare.
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- Quoi ?
Il rit plus encore, plié sur le volant.
- Oh ? Qu'est-ce que je ne comprends pas ?
- Rien, c'est samedi soir, pour lui.
- Samedi soir ?
Il essuie une larme :
- Oui... Tu sais bien, il a picolé...
C'est ainsi que le long du Krüger Park, en Afrique du Sud, j'appris que les animaux sauvages sont adeptes de l'alcool. Non, ils ne l'achètent pas par packs de 24. C'est dans les fruits trop murs ou par les moissons fermentées, qu'ils ingurgitent par quintal, que les pachydermes dénichent leur ivresse.
Pour en savoir davantage, sous la houlette du psychologue Ronald K. Siegel, de l'université de Californie, une équipe de chercheurs a parcouru l'Afrique, l'Amérique du Sud, l'Asie tropicale et l'Océanie. Et recensé près de 2 000 cas de mammifères, oiseaux, reptiles et même insectes - adeptes de l'alcool et autres drogues "naturelles" (haschich des efflorescences du chanvre indien, opium des fruits du pavot, cocaïne de la coca, etc.).
Les chercheurs se sont en particulier intéressés à l'éléphant. On raconte des histoires de troupeaux joyeux, piétinant des dépôts de céréales ou se roulant dans des tapis de fruits fermentés. Rendus ensuite "bizarres" par l'alcool, ils déferlent parfois ensuite sur les villages, et aplatissent tout au passage.
Ne reculant devant rien, l'équipe de Siegel s'est livrée à une série d'expériences dans un parc de Californie. Ce qui a permis de constater que c'est à une concentration de sept degrés par litre que les pachydermes apprécient le mieux l'alcool.
Le chercheur en déduit que les animaux ont davantage qu'une simple "consommation opportuniste". A son avis les éléphants s'enivrent intentionnellement de manière à apaiser leurs souffrances ou le stress de leur vie quotidienne, exactement comme le feraient les humains. Une idée qui s'appuie sur le constat qu'en situation de stress (surpopulation) les pachydermes consomment davantage de fruits alcoolisés...
Etrange et "morale" conclusion. Pourquoi les éléphants n'auraient-ils pas simplement du "plaisir" a se sentir plus "légers" et à partager cette sensation, comme nous autres dans les bars à bière ?
24.6.07
Fantômes de Guyane (1)
Kourou et ses nuages de fumée spatiale, bien sûr. Pas seulement. Le carnaval, le désert de la place des Palmistes, le dimanche matin. Les sorties à la Crique, le soir, poches vides, pour aller se frotter aux princesses et aux mauvais garçons. Les discussions avec les Haïtiens, dans les odeurs de tambouille mêlée de terre humide, et la traversée de la magique forêt avec les indiens Maronis, ombres qui soudain s'évanouissent sur la trace d'un animal, et vous laissent des heures, paralysé dans l'Océan vert, à la merci de vos terreurs inavouées...
Patrick Balta, ancien pêcheur, charpentier de marine, est architecte naval. Au fil de nos discussions, comme nous parlions voiliers et voyages, et écriture aussi, il a bien voulu me montrer ses textes sur la Guyane. Je les trouve bouleversants. En voici deux premiers.
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LE CONTEXTE :
« J'avais 21 ans, en 69. Demi-propriétaire avec mon père et patron d'un bateau de pêche de 17 mètres acheté à Audierne. Un ancien thonier à moteur construit en chêne. Le pauvre n'a pas résisté à l'attaque des tarets dans la rivière de Cayenne.
Le seul endroit en Guyane à l'époque pour sortir un bateau était à St Laurent : un slip-way installé par les Américains de la COCOMA, Compagnie de Congélation du Maroni. Les Américains pêchaient la crevette, la "paeneus bresiliensis" dans les fonds de 20 à 40 m entre le Maroni et l'Amazone, en gros.
Mais il fallait attendre un "créneau" avant de pouvoir sortir le bateau. Plus d'un mois sur place sans un sou. Le temps qu'il faut pour prendre goût au lieu, faire des connaissances. Tout va très vite dans ce genre d'endroit. J'y suis souvent revenu et je suis resté 6 mois à St Jean où je devais dessiner et construire une goélette de 15 m en bois d'amarante avec un
scieur du coin. Une autre histoire, qui ne vit jamais le jour.
SON TEXTE :
VII
Quelquefois, dans les contrées hivernales et froides, des hommes et des femmes imaginent une chaude et lointaine Guyane. Des mirages envoûtants hantent leurs songes pendant des années. Les idées de l'enfer vert étouffant de moiteur deviennent des douceurs dans leur cœur glacé.
Alors ils rêvent...
Ça arrive aussi un jour, en sortant du métro, sur le zinc, devant un petit noir et un croissant chaud. Une chanson, le vague souvenir d'un récit. La lassitude ou peut-être un chagrin persistant. Le désir grandit, refaire une nouvelle vie, loin de tout.
Le voyage commence déjà dans les livres et sur les cartes. Guyane, terre d'aventure, un espace si grand et si peu habité, justement, si peu habité... Les images se forment, jour après jour. Transpirer sous les arbres géants chargés de lianes, naviguer sur des fleuves généreux accompagnés de perroquets et de toucans affectueux. Oublier et tout reconstruire en plus beau, plus fort, plus attrayant...
A force de le désirer, ils arrivent enfin dans les rues de Cayenne.
Ce n'est pas la fin, c'est le début.
Des chiens faméliques traînent le long des trottoirs et dans les profonds caniveaux entre les maisons qui semblent avoir enduré des siècles d'intempéries sous leur toiture rouillée. Il fait si chaud qu'ils regrettent déjà les hivers glacés.
Où sont les paradis sauvages ? Faut-il encore les mériter ?
En passant près de la rivière Caca (« La Crique » qui traverse Cayenne a été fouillée sur l'ordre du gouverneur Laussat. Les marées remplissent et vident régulièrement ce canal envasé) ils pensent maintenant que tout est vrai, tout ce qu'on a dit, le climat suffocant et malsain, les microbes, les vermines, les parasites, les fièvres tropicales...
Des relents fétides de vase pourrie et de poissons morts dans des pirogues à moitié coulées, se répandent à travers les rues.
Le bagne avait sa place ici, c'est certain.
Cayenne, bidonville rouge, sale, brûlant, assis au bord d'une mer boueuse, opaque, inquiétante. Ici, on rêve des rues de Paris. Faut-il toujours rêver d'un autre ailleurs ? Le voyage n'aura-t-il jamais de fin ?
Et puis le soir arrive.
Les langues se délient. Le Guyanais parle un français clair et châtié. Il est avenant et communique avec aisance. Il dénigre sa Guyane en usant de mots qui parlent d'amour. Au bout de trois phrases, on comprend qu'il est sorti de cette terre qui transpire toujours des pores de sa peau. Cette terre immense, il aime la partager et ses yeux brillent de passion dès qu'il en parle ; elle est à lui et à ceux qui succombent sous le charme.
Les tôles rouillées et les palmiers se dessinent dans les couleurs flamboyantes d'un coucher de soleil apaisant ; on découvre que le charme de la Guyane est profond comme la forêt et que la réalité promet d'être plus envoûtante que les rêves.
L
Manuel fait gicler les têtes avec ses pouces. Combien de crevettes sont passées dans ses mains ? Le sait-il ? A quoi pense-t-il ? Le Brésil, sa famille, ses copains, la Crique à Cayenne avec les prostituées, s'éclater une dernière fois et mourir pour que tout s'arrête.
Manuel, à quoi penses-tu donc ? Le couffin que tu vas bricoler dans une écorce de maripa (palmier dont les fruits sortent d'une énorme "cosse") pour ton dernier-né, bientôt. As-tu un carbet à toi ? Bien sûr, une maison en bois le long d'une crique à l'ombre des palmiers bâches. Tu fabriqueras un escalier sur la droite en entrant, un balcon avec un hamac. Tu fais une sieste avec ta femme. Ta femme, que fait-elle, ta femme, en ce moment ? Qu'en sais-tu, tu es peut-être cocu. Mais pourquoi se faire souffrir inutilement ? Tu n'en baves donc pas assez comme ça ?
Embarquer sur une tapouille à la fin de cette pêche, un super voyage à la voile, en silence, le silence des vagues, le silence des crevettes, le silence des oiseaux. L'Amazone, loin de l'enfer, loin de la guillotine sèche (le bagne était ainsi qualifié). Tu ne sais pas qu'on appelait cet endroit de cette manière poétique mais tu n'as pas besoin de le savoir pour l'apprécier ! Bien sûr, tu rêves de rentrer au pays, te laisser aller un peu au sommeil, tout simplement...
Mais il faut continuer à vivre, alors tu ne partiras pas, tu continueras ici, tu te feras encore violence pour tenir. Tu n'as pas trouvé ce précieux boulot pour t'en aller si vite.
Manuel, tu te dis qu'il ne faut pas penser, juste arracher ces putains de têtes de crevettes, encore, encore... Encore un peu, encore une dernière fois parce que tu as tout flambé à la fin de la dernière campagne et qu'il faut pourtant continuer à gagner des dollars, nourrir les gosses, les faire grandir. Leur petite frimousse rigolarde, tu les aimes tellement. Bientôt tu verseras une larme à cause de la tendresse que tu ne leur donnes pas en ce moment. Tu les prends dans tes bras à moins que ce soit eux qui te tiennent la main. C'est ça, une larme, un petit coup de saudade, même si des fois tu voudrais tout laisser tomber et recommencer ailleurs...
Non, pas recommencer, jamais de la vie ! Tu en as marre de cette vie, ta vie qui passe si vite. Regarde ce jour, quel est-il ? Dans quelle année ? Tu vas encore flamber c'est plus fort que toi, une bouteille de tafia, deux jours de tafia, deux jours de débauche avec les filles de Cayenne, deux jours d'oubli dans leurs bras voluptueux avant de repartir pour une nouvelle campagne de trois semaines. Tout dépenser jusqu'au dernier centime pour en profiter à mort...
Un jour, ce sera la dernière fois, tu ne pourras plus repartir, tu seras malade ou trop vieux ou trop fatigué. Personne ne sera là pour te soutenir ou te remercier de tes efforts. Il faudrait y penser, oui, y penser quand tu auras le temps, plus tard, plus tard. Tu pourrais revoir tout ça, être quelque part sur l'Ile de Marajo à pêcher des machoirans, et ce serait bien assez pour se nourrir. Quelle idée d'être ici dans cet enfer ? Forçat volontaire sur un bateau américain. La Guyane et ses mirages ! Il reste ici un relent de prison et de bagne. Les Américains ont pourtant tellement insisté pour que la France ferme le pénitencier... Mais pour toi, Manuel, ce n'est pas une idée, c'est une façon de gagner ta vie.
Les mois passent, les uns après les autres. Ici, c'est dur. C'est dur de travailler vingt-quatre heures par jour mais tu n'as pas besoin de réfléchir, d'ailleurs tu n'en as pas la force. Plus tu arraches les têtes et plus tu gagnes des dollars, c'est tout. Et puis tu crois que, de toute façon, tu ne saurais rien faire d'autre parce que tu n'es pas allé à l'école, parce que tu n'es qu'un caboclo (métis d'Amérindien et de Portugais). Alors ce n'est pas la peine de penser à une autre vie, c'est trop difficile, on n'a pas le temps. On verra plus tard...
Bruits du Caterpillar, le rythme, la pulsation sur la cadence des vagues, une musique, une samba endiablée, le Carnaval de Rio.
Muito bom. Il y a plein de monde, on chante, on danse comme des fous. Une femme presque nue, là, dans la fumée de l'échappement, dans la fumée du Carnaval. La musique continue, toujours la même rengaine qui vient et qui revient sans cesse. Et les images défilent avec de plus en plus de couleurs. Tu te mets à parler tout seul en crevant machinalement toutes ces crevettes en pleine mer au large de ton pays. Tu t'évades comme tu peux, tu as ton truc à toi. Une cigarette, un coup d'œil sur la mer et te voilà reparti pour un nouveau voyage imaginaire. Rêver comme si de rien n'était pendant que tes mains travaillent toutes seules, une tête, une queue, une tête... Tu ne sais plus ce que tu fais, tu fais.
Maintenant tu ouvres les yeux. Il fait totalement nuit, tu avais oublié que tu étais dans ce cauchemar qui n'en finit plus.
Un petit banc de vingt centimètres, une raclette en bois, des gants en caoutchouc, des crevettes mélangées dans des tonnes de poissons morts, continuer encore...
La fumée de l'échappement tourbillonne dans la lumière du projecteur et les gouttes de pluie sont comme des flocons de neige.
Manuel arrache toujours les têtes des crevettes, assis sur la plage arrière du chalutier américain.
Qu'y a-t-il dans l'esprit d'un marin brésilien au large de la Guyane ou du Brésil ?
Par l'imagination, on peut sortir de ce bateau et le regarder s'enfoncer dans la nuit...
Patrick Balta, ancien pêcheur, charpentier de marine, est architecte naval. Au fil de nos discussions, comme nous parlions voiliers et voyages, et écriture aussi, il a bien voulu me montrer ses textes sur la Guyane. Je les trouve bouleversants. En voici deux premiers.
photo
LE CONTEXTE :
« J'avais 21 ans, en 69. Demi-propriétaire avec mon père et patron d'un bateau de pêche de 17 mètres acheté à Audierne. Un ancien thonier à moteur construit en chêne. Le pauvre n'a pas résisté à l'attaque des tarets dans la rivière de Cayenne.
Le seul endroit en Guyane à l'époque pour sortir un bateau était à St Laurent : un slip-way installé par les Américains de la COCOMA, Compagnie de Congélation du Maroni. Les Américains pêchaient la crevette, la "paeneus bresiliensis" dans les fonds de 20 à 40 m entre le Maroni et l'Amazone, en gros.
Mais il fallait attendre un "créneau" avant de pouvoir sortir le bateau. Plus d'un mois sur place sans un sou. Le temps qu'il faut pour prendre goût au lieu, faire des connaissances. Tout va très vite dans ce genre d'endroit. J'y suis souvent revenu et je suis resté 6 mois à St Jean où je devais dessiner et construire une goélette de 15 m en bois d'amarante avec un
scieur du coin. Une autre histoire, qui ne vit jamais le jour.
SON TEXTE :
VII
Quelquefois, dans les contrées hivernales et froides, des hommes et des femmes imaginent une chaude et lointaine Guyane. Des mirages envoûtants hantent leurs songes pendant des années. Les idées de l'enfer vert étouffant de moiteur deviennent des douceurs dans leur cœur glacé.
Alors ils rêvent...
Ça arrive aussi un jour, en sortant du métro, sur le zinc, devant un petit noir et un croissant chaud. Une chanson, le vague souvenir d'un récit. La lassitude ou peut-être un chagrin persistant. Le désir grandit, refaire une nouvelle vie, loin de tout.
Le voyage commence déjà dans les livres et sur les cartes. Guyane, terre d'aventure, un espace si grand et si peu habité, justement, si peu habité... Les images se forment, jour après jour. Transpirer sous les arbres géants chargés de lianes, naviguer sur des fleuves généreux accompagnés de perroquets et de toucans affectueux. Oublier et tout reconstruire en plus beau, plus fort, plus attrayant...
A force de le désirer, ils arrivent enfin dans les rues de Cayenne.
Ce n'est pas la fin, c'est le début.
Des chiens faméliques traînent le long des trottoirs et dans les profonds caniveaux entre les maisons qui semblent avoir enduré des siècles d'intempéries sous leur toiture rouillée. Il fait si chaud qu'ils regrettent déjà les hivers glacés.
Où sont les paradis sauvages ? Faut-il encore les mériter ?
En passant près de la rivière Caca (« La Crique » qui traverse Cayenne a été fouillée sur l'ordre du gouverneur Laussat. Les marées remplissent et vident régulièrement ce canal envasé) ils pensent maintenant que tout est vrai, tout ce qu'on a dit, le climat suffocant et malsain, les microbes, les vermines, les parasites, les fièvres tropicales...
Des relents fétides de vase pourrie et de poissons morts dans des pirogues à moitié coulées, se répandent à travers les rues.
Le bagne avait sa place ici, c'est certain.
Cayenne, bidonville rouge, sale, brûlant, assis au bord d'une mer boueuse, opaque, inquiétante. Ici, on rêve des rues de Paris. Faut-il toujours rêver d'un autre ailleurs ? Le voyage n'aura-t-il jamais de fin ?
Et puis le soir arrive.
Les langues se délient. Le Guyanais parle un français clair et châtié. Il est avenant et communique avec aisance. Il dénigre sa Guyane en usant de mots qui parlent d'amour. Au bout de trois phrases, on comprend qu'il est sorti de cette terre qui transpire toujours des pores de sa peau. Cette terre immense, il aime la partager et ses yeux brillent de passion dès qu'il en parle ; elle est à lui et à ceux qui succombent sous le charme.
Les tôles rouillées et les palmiers se dessinent dans les couleurs flamboyantes d'un coucher de soleil apaisant ; on découvre que le charme de la Guyane est profond comme la forêt et que la réalité promet d'être plus envoûtante que les rêves.
L
Manuel fait gicler les têtes avec ses pouces. Combien de crevettes sont passées dans ses mains ? Le sait-il ? A quoi pense-t-il ? Le Brésil, sa famille, ses copains, la Crique à Cayenne avec les prostituées, s'éclater une dernière fois et mourir pour que tout s'arrête.
Manuel, à quoi penses-tu donc ? Le couffin que tu vas bricoler dans une écorce de maripa (palmier dont les fruits sortent d'une énorme "cosse") pour ton dernier-né, bientôt. As-tu un carbet à toi ? Bien sûr, une maison en bois le long d'une crique à l'ombre des palmiers bâches. Tu fabriqueras un escalier sur la droite en entrant, un balcon avec un hamac. Tu fais une sieste avec ta femme. Ta femme, que fait-elle, ta femme, en ce moment ? Qu'en sais-tu, tu es peut-être cocu. Mais pourquoi se faire souffrir inutilement ? Tu n'en baves donc pas assez comme ça ?
Embarquer sur une tapouille à la fin de cette pêche, un super voyage à la voile, en silence, le silence des vagues, le silence des crevettes, le silence des oiseaux. L'Amazone, loin de l'enfer, loin de la guillotine sèche (le bagne était ainsi qualifié). Tu ne sais pas qu'on appelait cet endroit de cette manière poétique mais tu n'as pas besoin de le savoir pour l'apprécier ! Bien sûr, tu rêves de rentrer au pays, te laisser aller un peu au sommeil, tout simplement...
Mais il faut continuer à vivre, alors tu ne partiras pas, tu continueras ici, tu te feras encore violence pour tenir. Tu n'as pas trouvé ce précieux boulot pour t'en aller si vite.
Manuel, tu te dis qu'il ne faut pas penser, juste arracher ces putains de têtes de crevettes, encore, encore... Encore un peu, encore une dernière fois parce que tu as tout flambé à la fin de la dernière campagne et qu'il faut pourtant continuer à gagner des dollars, nourrir les gosses, les faire grandir. Leur petite frimousse rigolarde, tu les aimes tellement. Bientôt tu verseras une larme à cause de la tendresse que tu ne leur donnes pas en ce moment. Tu les prends dans tes bras à moins que ce soit eux qui te tiennent la main. C'est ça, une larme, un petit coup de saudade, même si des fois tu voudrais tout laisser tomber et recommencer ailleurs...
Non, pas recommencer, jamais de la vie ! Tu en as marre de cette vie, ta vie qui passe si vite. Regarde ce jour, quel est-il ? Dans quelle année ? Tu vas encore flamber c'est plus fort que toi, une bouteille de tafia, deux jours de tafia, deux jours de débauche avec les filles de Cayenne, deux jours d'oubli dans leurs bras voluptueux avant de repartir pour une nouvelle campagne de trois semaines. Tout dépenser jusqu'au dernier centime pour en profiter à mort...
Un jour, ce sera la dernière fois, tu ne pourras plus repartir, tu seras malade ou trop vieux ou trop fatigué. Personne ne sera là pour te soutenir ou te remercier de tes efforts. Il faudrait y penser, oui, y penser quand tu auras le temps, plus tard, plus tard. Tu pourrais revoir tout ça, être quelque part sur l'Ile de Marajo à pêcher des machoirans, et ce serait bien assez pour se nourrir. Quelle idée d'être ici dans cet enfer ? Forçat volontaire sur un bateau américain. La Guyane et ses mirages ! Il reste ici un relent de prison et de bagne. Les Américains ont pourtant tellement insisté pour que la France ferme le pénitencier... Mais pour toi, Manuel, ce n'est pas une idée, c'est une façon de gagner ta vie.
Les mois passent, les uns après les autres. Ici, c'est dur. C'est dur de travailler vingt-quatre heures par jour mais tu n'as pas besoin de réfléchir, d'ailleurs tu n'en as pas la force. Plus tu arraches les têtes et plus tu gagnes des dollars, c'est tout. Et puis tu crois que, de toute façon, tu ne saurais rien faire d'autre parce que tu n'es pas allé à l'école, parce que tu n'es qu'un caboclo (métis d'Amérindien et de Portugais). Alors ce n'est pas la peine de penser à une autre vie, c'est trop difficile, on n'a pas le temps. On verra plus tard...
Bruits du Caterpillar, le rythme, la pulsation sur la cadence des vagues, une musique, une samba endiablée, le Carnaval de Rio.
Muito bom. Il y a plein de monde, on chante, on danse comme des fous. Une femme presque nue, là, dans la fumée de l'échappement, dans la fumée du Carnaval. La musique continue, toujours la même rengaine qui vient et qui revient sans cesse. Et les images défilent avec de plus en plus de couleurs. Tu te mets à parler tout seul en crevant machinalement toutes ces crevettes en pleine mer au large de ton pays. Tu t'évades comme tu peux, tu as ton truc à toi. Une cigarette, un coup d'œil sur la mer et te voilà reparti pour un nouveau voyage imaginaire. Rêver comme si de rien n'était pendant que tes mains travaillent toutes seules, une tête, une queue, une tête... Tu ne sais plus ce que tu fais, tu fais.
Maintenant tu ouvres les yeux. Il fait totalement nuit, tu avais oublié que tu étais dans ce cauchemar qui n'en finit plus.
Un petit banc de vingt centimètres, une raclette en bois, des gants en caoutchouc, des crevettes mélangées dans des tonnes de poissons morts, continuer encore...
La fumée de l'échappement tourbillonne dans la lumière du projecteur et les gouttes de pluie sont comme des flocons de neige.
Manuel arrache toujours les têtes des crevettes, assis sur la plage arrière du chalutier américain.
Qu'y a-t-il dans l'esprit d'un marin brésilien au large de la Guyane ou du Brésil ?
Par l'imagination, on peut sortir de ce bateau et le regarder s'enfoncer dans la nuit...
23.6.07
«Elle a décollé, sa fusée ? »
Cela se passe au début des années 80. La première fois que le jeune apprenti que j’étais fut expédié à Kourou, en notre lointaine Guyane. Ariane, la fusée européenne, n’était pas encore tout à fait « finalisée». La coquine parfois s'imaginait que sa mission consistait à aller coincer des bulles au fond de l’Atlantique. A la vitesse de la foudre alors, à Paris et à Cayenne, on planquait le champagne, on minimisait l’incident, et l’on faisait trinquer quelques lampistes.
En conséquence de quoi mon agence, (l’AFP pas la CIA) dépêchait pour chaque lancement au Centre spatial un journaliste « scientifique ». Sa mission : constater sur place que l’Ariane avait filé bien droit vers le ciel, conformément aux prétentions de l’autre agence (spatiale, pas la CIA), et dans le cas contraire, tenter de dénicher les vraies raisons du dramatique bouillon. C’est-à-dire pénétrer dans la langue de bois à coups de machette, ou mieux, dénicher l’expert qui sous couvert d’anonymat soulagerait ses nerfs en détaillant la cause de ce qui avait coûté des centaines de millions.
Mais bon, lorsque tout allait bien, le « clou » de l’expédition était un URGENT victorieux. La dépêche, élégante comme du Pouchkine, qui, une quinzaine de minutes après le rugissement des tuyères du premier étage, signait la victoire. Du genre :
ESPACE-ARIANE
TT H RR MN
URGENT
SUCCES LANCEMENT ARIANE
KOUROU, RR sept AAAA (AFP) - Le lanceur européen Ariane a décollé à XXhTTmn GMT du centre spatial de Kourou (Guyane Française), a pu constater l’AFP sur place. La mission s’est déroulée sans incident, et le satellite POUET que transportait le lanceur européen a été mis sur l’orbite visée par les techniciens du centre de contrôle. Les paramètre sont « nominaux » précise-t-on au Centre Spatial Guyanais.
pal/
Oui, « pal » était mon obscure gloire à moi. Ma « signature ».
Mais voilà. Si je suis retourné à Kourou 15 autres fois, ce jour-là, le premier, les choses ne se passèrent pas tout à fait comme prévu.
Le premier papillon frappa dans l’avion. Par crainte d’arriver fatigué à Kourou, j’avalai une pilule à sommeil. Le second hyménoptère me cueillit à la descente. Sur le tarmac surchauffé, dans l’air moite aux odeurs de terres rouges et acides de Cayenne, des membres du Centre Spatial avaient improvisé un piège amical, à base de « Ti’punch ». Après douze heures d’avion, et à moitié endormi, cela se boit comme du lait.
Une heure de car de sueur et de soif plus tard, à Kourou, nouveau papillon : musique, danseuses guyanaises et verres de « planteur ».
Par hasard, je trouve ma chambre, m’effondre raide comme un cocotier, et sombre dans la béatitude de la cuite absolue.
Lorsque j’émergeai, Ariane avait festoyé dans l’espace depuis longtemps. J’avais dormi 16 heures !
Bref, j’étais viré. Ma jeune carrière d’agencier s’arrêtait là.
Comme je contemplais la houle boueuse qui court de Kourou jusqu’à l’île du Diable et jadis portait les chaloupes au bagne, on frappa. C’était ma consoeur de Reuter. Ma concurrente, plutôt. Jolie, brune, souriante.
- How are you, AFP ?
Elle s'assit et m’expliqua. Comme le car des journalistes devait repartir pour le Centre de contrôle et le compte à rebours du lancement, deux ou trois confrères m’avaient cherché. Et fait ouvrir ma chambre avec un passe. Je ne tenais pas debout, avec mon mélange. Dans mon dossier, elle avait pu dénicher le numéro à appeler pour dicter le rituel "urgent". Pour le reste, elle connaissait notre métier.
Elle me laissa là, à dégriser, se rendit au lancement, appela ma rédaction en chef, inventant que j’avais un incident de téléphone sur le site d’observation éloigné où je me trouvais, qui m'empêchait de joindre Paris. Elle prétendit que je lui avais demandé comme un service de donner le feu vert pour les urgents, également préparés à Paris, en cas de problème de transmissions.
À deux heures du matin (à Paris), le Kador de permanence, fatigué et rompu à d’autres combats, lui répliqua : «Bon, on s’en fout. Alors elle a décollé sa fusée ? On peut balancer ?»
Bref ma concurrente directe, avec laquelle nous nous combattions d’habitude pour « passer » sur le fil une dépêche une minute avant l’autre, venait de me sauver des eaux. Il ne me restait plus qu’à rédiger, malgré la migraine, un papier de suivi, plus développé.
Je l’embrassai. Pas seulement comme du bon pain. Et n'ai plus jamais pris de somnifères avec mon rhum.
Bon, je rassure les pessimistes. Tout n’est pas fleur bleue sur la planète presse. J’ai connu ce correspondant en poste à Moscou pour une grande chaîne de télévision, qui soudoyait la téléphoniste de cet endroit reculé du Kazakhstan afin que la seule ligne disponible soit rigoureusement « en panne » pour les autres journaux.
En conséquence de quoi mon agence, (l’AFP pas la CIA) dépêchait pour chaque lancement au Centre spatial un journaliste « scientifique ». Sa mission : constater sur place que l’Ariane avait filé bien droit vers le ciel, conformément aux prétentions de l’autre agence (spatiale, pas la CIA), et dans le cas contraire, tenter de dénicher les vraies raisons du dramatique bouillon. C’est-à-dire pénétrer dans la langue de bois à coups de machette, ou mieux, dénicher l’expert qui sous couvert d’anonymat soulagerait ses nerfs en détaillant la cause de ce qui avait coûté des centaines de millions.
Mais bon, lorsque tout allait bien, le « clou » de l’expédition était un URGENT victorieux. La dépêche, élégante comme du Pouchkine, qui, une quinzaine de minutes après le rugissement des tuyères du premier étage, signait la victoire. Du genre :
ESPACE-ARIANE
TT H RR MN
URGENT
SUCCES LANCEMENT ARIANE
KOUROU, RR sept AAAA (AFP) - Le lanceur européen Ariane a décollé à XXhTTmn GMT du centre spatial de Kourou (Guyane Française), a pu constater l’AFP sur place. La mission s’est déroulée sans incident, et le satellite POUET que transportait le lanceur européen a été mis sur l’orbite visée par les techniciens du centre de contrôle. Les paramètre sont « nominaux » précise-t-on au Centre Spatial Guyanais.
pal/
Oui, « pal » était mon obscure gloire à moi. Ma « signature ».
Mais voilà. Si je suis retourné à Kourou 15 autres fois, ce jour-là, le premier, les choses ne se passèrent pas tout à fait comme prévu.
Le premier papillon frappa dans l’avion. Par crainte d’arriver fatigué à Kourou, j’avalai une pilule à sommeil. Le second hyménoptère me cueillit à la descente. Sur le tarmac surchauffé, dans l’air moite aux odeurs de terres rouges et acides de Cayenne, des membres du Centre Spatial avaient improvisé un piège amical, à base de « Ti’punch ». Après douze heures d’avion, et à moitié endormi, cela se boit comme du lait.
Une heure de car de sueur et de soif plus tard, à Kourou, nouveau papillon : musique, danseuses guyanaises et verres de « planteur ».
Par hasard, je trouve ma chambre, m’effondre raide comme un cocotier, et sombre dans la béatitude de la cuite absolue.
Lorsque j’émergeai, Ariane avait festoyé dans l’espace depuis longtemps. J’avais dormi 16 heures !
Bref, j’étais viré. Ma jeune carrière d’agencier s’arrêtait là.
Comme je contemplais la houle boueuse qui court de Kourou jusqu’à l’île du Diable et jadis portait les chaloupes au bagne, on frappa. C’était ma consoeur de Reuter. Ma concurrente, plutôt. Jolie, brune, souriante.
- How are you, AFP ?
Elle s'assit et m’expliqua. Comme le car des journalistes devait repartir pour le Centre de contrôle et le compte à rebours du lancement, deux ou trois confrères m’avaient cherché. Et fait ouvrir ma chambre avec un passe. Je ne tenais pas debout, avec mon mélange. Dans mon dossier, elle avait pu dénicher le numéro à appeler pour dicter le rituel "urgent". Pour le reste, elle connaissait notre métier.
Elle me laissa là, à dégriser, se rendit au lancement, appela ma rédaction en chef, inventant que j’avais un incident de téléphone sur le site d’observation éloigné où je me trouvais, qui m'empêchait de joindre Paris. Elle prétendit que je lui avais demandé comme un service de donner le feu vert pour les urgents, également préparés à Paris, en cas de problème de transmissions.
À deux heures du matin (à Paris), le Kador de permanence, fatigué et rompu à d’autres combats, lui répliqua : «Bon, on s’en fout. Alors elle a décollé sa fusée ? On peut balancer ?»
Bref ma concurrente directe, avec laquelle nous nous combattions d’habitude pour « passer » sur le fil une dépêche une minute avant l’autre, venait de me sauver des eaux. Il ne me restait plus qu’à rédiger, malgré la migraine, un papier de suivi, plus développé.
Je l’embrassai. Pas seulement comme du bon pain. Et n'ai plus jamais pris de somnifères avec mon rhum.
Bon, je rassure les pessimistes. Tout n’est pas fleur bleue sur la planète presse. J’ai connu ce correspondant en poste à Moscou pour une grande chaîne de télévision, qui soudoyait la téléphoniste de cet endroit reculé du Kazakhstan afin que la seule ligne disponible soit rigoureusement « en panne » pour les autres journaux.
22.6.07
Un Mystère sur Mars ? (2)
L'énigme était : Que représente cette ombre parfaite et si ronde ?
Voici
L'image établie à partir des données captées depuis la sonde orbitale "Mars Reconnaissance Orbiter" par l'instrument à haute résolution HiRISE nous dévoile la région du nord-est d'Arsia Mons, morne plaine de laves martienne. Et la petite ombre sans nuances, noire comme l'enfer, est un gouffre, formé par effondrement du toit d'une cavité.
Les images distillées par cette sonde ont permis de compter sept grottes effondrées de ce type à la surface de Mars. Glen Cushing, Tim Titus, J. Judson Wynne et Phil Christensen, leurs découvreurs les ont baptisées : Dena, Chloe, Wendy, Annie, Abbey, Nikki et Jeanne.
Parions que la thèse des Martiens vivant sous la surface rouge va ressurgir comme taupe de son trou... Une fois encore, la Nasa nous ment, c'est évident. Il crève l'oeil qu'il s'agit là de puits d'aération des vastes cités souterraines (non, on ne dit pas sous-martiennes). Je force ? Pour ceux qui ignorent la jolie histoire de la rumeur de la "Face" de Mars, promis je vous la raconte prochainement.
Encore une image HiRISE, pour le seul plaisir de nos yeux :
(Dunes, région du cratère Proctor)
...
"Qui sera peut-être une étoile filante
Ou bien le faux éclair d'une illusion
Dans la caverne que creusent en nous
Nos avides prunelles."
Hector de Saint-Denys Garneau. (Regards et jeux dans l'espace)
21.6.07
Z'auriez pas vu mon Lulu ?
Voici Ludwig. Enfin une photo de Lulu, quoi.
Ce fier et raide flamant n'est pas celui du regretté Stephen Jay Gould qui lui-même écrivait des chroniques échevelées (dont le fameux "Sourire du flamant rose" (Points Sciences, 1985)), et faisait le paléontologue à Harvard, et à l'occasion renversait des carafes d'eau sur la tête de son collègue entomologiste Edward O Wilson, sur l'estrade d'un colloque en le traitant de ... pour délit de sociobiologie et autres parallèles soufrés entre fourmis et humains.
On savait rigoler, à l'époque, dans les congrès, aux Etats-Unis.
Lulu, disai-je, n'est pas mon porte-serviette. Ni mon porte-plumes.
Ludwig le rose est une créature "fantasmatique", campée par l'oeil de Quentin Bertoux, photographe, (voir ses "momages", en amont dans ce blog, et devant oeuvrer pour les affiches pour le théâtre des Treize Vents (Montpellier). Flamant d'affiche, ça la fiche pas mal, non ?
J'avais envie de de vous le montrer ici, moi, ce Ludwig. Si vous insistez, je vous dévoilerai le reste de ses aventures : en avion, sur la rivière, en pirate, etc.
Ce fier et raide flamant n'est pas celui du regretté Stephen Jay Gould qui lui-même écrivait des chroniques échevelées (dont le fameux "Sourire du flamant rose" (Points Sciences, 1985)), et faisait le paléontologue à Harvard, et à l'occasion renversait des carafes d'eau sur la tête de son collègue entomologiste Edward O Wilson, sur l'estrade d'un colloque en le traitant de ... pour délit de sociobiologie et autres parallèles soufrés entre fourmis et humains.
On savait rigoler, à l'époque, dans les congrès, aux Etats-Unis.
Lulu, disai-je, n'est pas mon porte-serviette. Ni mon porte-plumes.
Ludwig le rose est une créature "fantasmatique", campée par l'oeil de Quentin Bertoux, photographe, (voir ses "momages", en amont dans ce blog, et devant oeuvrer pour les affiches pour le théâtre des Treize Vents (Montpellier). Flamant d'affiche, ça la fiche pas mal, non ?
J'avais envie de de vous le montrer ici, moi, ce Ludwig. Si vous insistez, je vous dévoilerai le reste de ses aventures : en avion, sur la rivière, en pirate, etc.
20.6.07
Et où se cache le réel ?
Sondes interplanétaires, télescopes spatiaux, accélérateurs de particules géants, éprouvettes et ordinateurs… La science progresse. Mais connaissons-nous mieux les dessous du monde aujourd’hui que lorsque Giordano Bruno rédigeait « de la Magie » ou Aristote « Physique» ? Qu’est-ce que le réel de cet univers que tente de nous dépeindre la science ?
Michel Serres, Philosophe
Etienne Klein, Physicien au CEA
(Certaines parties parues dans le Figaro en 2001)
cascade
Le Complot des Papillons :
Philip K. Dick écrivait que le réel c’est ce qui reste lorsque l’on ne croit plus en rien de ce que l’on perçoit. Pour vous, qu’est le réel de la philosophie, celui de la science ?
Michel Serres
Quand on emploie le terme de réel, on ne sait pas de quoi l’on parle.
À première vue, il y a le réel de la perception, le réel de la passion, qui dépend de l’âge, de la culture, qui dépend du moment de l’histoire. Le réel d’un ancien Grec ce n’est pas le même que celui d’un contemporain et ainsi de suite…
La question du réel a divisé les écoles philosophiques en deux depuis plusieurs millénaires. C’est deux écoles sont l’idéalisme et le réalisme. L’idéaliste dit que le réel c’est notre représentation du monde, notre idée… Le réaliste dit le réel extérieur à ma représentation, il existe.
Mais ces deux décisions sont asymétriques. La première est toujours démontrable. On peut toujours montrer que le réel est une représentation, puisque la démonstration est incluse dans la proposition. Tandis que dire que le réel est extérieur à nos représentations n’est jamais démontrable. C’est un acte de foi. Et précisément, la science est fondée sur cet acte de foi.
La science a pour but de toujours faire échapper le réel dont elle parle aux représentations. C’est un problème asymptotique, elle n’y parvient jamais…
Une expérience a toujours besoin d’une théorie et la théorie a toujours besoin d’une expérience. Et ce mélange théorie-expérience fait un réel qui est toujours mêlé de représentation. A mesure que la science avance le réel recule et devient une sorte de point asymptotique vers lequel la représentation avance.
Le C. des P.
De ce point de vue la science avance ?
MS
Sur la question du réel, ce qui avance c’est un certain nombre de saisies, de techniques perceptives ou expérimentales. Surtout ce qui avance ce sont les techniques de mesure. Quand on en est au nanomètre on est, me semble-t-il, plus proche du réel que lorsqu’on était au centimètre. Mais de quel réel s’agit-il ?
EK
Naïvement on pourrait dire que le réel de la physique c’est la matière. Et en gros il y a deux sortes de contacts possibles avec elle.. Le contact direct : on observe les choses, les matériaux… On tape sur cette table, on constate qu’elle résiste. Et l’on tire de ces contacts le sentiment d’un présence matérielle qui est non alimentée par une représentation. Et puis il y a une deuxième possibilité de contact avec la matière qui est celle qui consiste à remplacer la matière par son double, par une mise en concept qui procède d’une stratégie de l’évitement. On contourne la matière pour essayer non pas de la regarder telle qu’elle est mais de la représenter par des concepts, des formalismes, des idées. Au bout du compte on espère qu’au bout de cette galipette conceptuelle on aboutira à une rencontre plus véritable que celle que l’on a de prime abord.
Michel dit que lorsque l’on est à l’échelle du nanomètre on a une matière plus réelle que celle au centimètre. Je n’en suis pas certain… L’une des questions que pose la physique aujourd’hui et notamment la physique quantique (utilisée pour décrire les phénomènes subatomiques ndlr) c’est le lien qu’il y a entre le réel empirique, tel qu’il se donne, celui des expériences, et puis la représentation que l’on en fait. Et là, on retrouve la dichotomie entre le réalisme, l’idéalisme et la démarche scientifique quand à l’accès au réel.
Le C. des P.
De quelle manière la physique pose-t-elle cette question du lien entre réel et imaginaire ?
EK
Le point de départ de la physique quantique consiste à dire que l’on va représenter les états physiques dans des espaces abstraits (par des vecteurs d’état) qui ont un nombre infini de dimensions, brefs qui ne sont pas l’identique de l’espace physique dans lequel ont lieu les phénomènes. La représentation des systèmes se situe donc dans un espace qui s’est émancipé de l’espace physique. C’est grâce à cette émancipation que l’on peut prédire correctement des résultats d’expériences qui vont pourtant se dérouler dans l’espace physique !
En choisissant ce type d’espace par nécessité, on a créé une brèche entre le réel empirique, le monde des expériences, et puis la représentation abstraite que nous en donnons
C’est dans cette brèche que viennent s’engouffrer les questions sur le lien entre la représentation abstraite et le résultat d’expériences qui ont lieu dans un réel à trois dimensions.
C’est quand même une expérience bouleversante pour un physicien que de faire des calculs dans ce que l’on appelle un espace de Hilbert, des calculs complètement abstraits qui finissent par arriver à un nombre réel qui correspond à un résultat possible d’expérience pour voir que c’est dans cet espace mathématique qu’il a fallu faire les calculs pour trouver le résultat de l’expérience concrète.
La représentation que propose la physique théorique aujourd’hui ce n’est pas une sténographie de l’expérience mais au contraire quelque chose qui s’émancipe de la réalité physique immédiate, s’en détourne complètement et y revient par le détour de règles de correspondance.
Mais cette émancipation est la cause de toutes les question épistémologiques que pose la physique aujourd’hui.
Le C. des P.
Mais au fur et à mesure que l’on avance, le réel se dérobe tout de même, on découvre toujours davantage de particules, de propriétés…
EK
L’idée que ce détour par un espace abstrait permet une rencontre plus profonde avec la matière est une idée qui est sous-jacente à la démarche scientifique du XXème siècle. On a toujours voulu aller vers le plus petit, le plus élémentaire au motif que c’est au niveau élémentaire que les lois fondamentales se révèlent dans leur simplicité extrême. Mais on peut contester ce point de vue. Il y a un renouveau de la physique aujourd’hui plus légère qui conteste l’idée que c’est aux hautes énergies et aux petites distances que le réel se donne vraiment. Car en fait quand on regarde les propriétés ordinaire que l’on attribue à la matière, comme la solidité, la localisation, la masse, la pénétrabilité, des trajectoires définies dans l’espace…, à petite échelle, celle des particules élémentaires, aucune de ces propriétés ne subsiste. Cela n’aurait pas de sens de dire qu’un électron a une texture bien définie, qu’il est impénétrable. Bref toutes les propriétés naturelles, spontanées que l’on attribue à la matière sont perdues au niveau des particules élémentaires.
Le C. des P.
Le réel s’évade encore…
MS
La matière qu’Etienne a pris pour naturelle, ou que l’espace physique qu’il prend pour naturel est déjà une élaboration, celle de la physiquedu passé. Le mot matière a mis longtemps a être mis en place, et les caractéristiques qu’il donne de la matière, la masse, l’impénétrabilité, les trajectoires, ont mis très très longtemps a apparaître en physique et en mécanique.
EK
L’impénétrabilité a été inventée par Blaise Pascal.
Le C. des P.
Et la masse, c’est Galilée...
MS
Oui c’est Galilée, mais masse, matière c’est un mot très ancien qui veut dire le bois. Materies en latin, c’est le bois. Et la racine, c’est matter, la mère. Et cette notion qui parait naturelle, on s’aperçoit que c’est un concept extraordinairement raffiné, venu du fond des temps… Matière c’est Aristote qui le trouve, puis le XVIIème siècle le reprend...
Lorsque les physiciens disent on s’émancipe de l’espace naturel, déjà cet espace naturel était un espace des physiciens anciens, qui s’étaient déjà émancipés. Comme la matière s’était émancipé du bois, et le bois de la mère, et ainsi de suite. On a des strates d’émancipation successives. Quand nos amis font la main à la pâte, quand ils disent la pâte, ils croient parler du naturel, mais en fait ils font référence à une notion qui vient de la physique de papa…
Quand un physicien dit naturel, c’est précisément la physique de papa qu’il invoque….
drop
Le C. des P.
En quoi réside le mystère de la mathématisation, de cette abstraction ? Ce qui est incompréhensible, c’est que le monde soit compréhensible, disait Einstein…
MS On fait gloire à Einstein de cela, mais Appolonius de Perge (Mathématicien grec, 200 av.J.-C.) posait déjà la question : comment se fait-il que les cieux obéissent à nos modèles géométriques ? Retomber sur les nombres ordinaires en venant de l’espace mathématique de Hilbert, comment cela se fait-il ? Einstein dit que c’est incompréhensible, avant lui, Kant disait que c’était un miracle…
EK
Quand on regarde la théorie quantique des champs, le fait qu’elle fonctionne aussi bien est quelque chose de profondément troublant, impressionnant. Cette efficacité mérite d’être interrogée. Dire que c’est un miracle n’est pas une attitude conforme à la raison.
Dominique Lambert propose des idées qui sont que l’efficacité des mathématiques est raisonnable car elles construisent des invariants et la notion d’invariant est constitutive de la notion d’objet. Si l’on prend un électron, tous les discours mathématique sur lui diront toujours que c’est un électron. Il est invariant, quelque soient les mathématiques que l’on emploie, comme si je fais le tour de Michel Serres, je reconnaitrai toujours Michel Serres. Sa réalité vient du fait qu’elle de dépend pas du point de vue que j’ai sur lui. Cela, les mathématiques savent l’exprimer par le biais des symétries.
Le C. des P.
La physique est donc en train de devenir une pensée mathématique ?
MS
Non. Les mathématiques contiennent des caractéristiques qui permettent de penser le monde physique, mais on ne sait jamais, dans une expérience donnée, quelles mathématiques vont fonctionner… Et là, j’ai quelque chose à dire d’un peu important. Si tu lis les Grecs, par exemple le Timée de Platon, tu t’aperçois qu’ils veulent déduire la physique des mathématiques. Alors ils échouent à faire de la physique, car ils croient précisément que l’on peut déduire les expériences des mathématiques. C’est comme cela qu’ils ont raté la physique.
On a récupéré la physique ensuite, en faisant des expériences. Pourquoi ? Il fallait avoir l’idée du contingent. C’est-à-dire qu’il y a un endroit du monde dont on ne sait pas quel endroit des mathématiques va en rendre compte.
Et le contingent est là pour une raison très simple, c’est parce que le monde a été créé. Et cela ne pouvait avoir lieu que dans une vision judéo-chrétienne du monde, avec le créationnisme. Tout le monde croit que le créationnisme est un déductionnisme… Non c’est un choix contingent . Par conséquent on ne sait jamais quel lieux des mathématiques rendra compte du lieu de l’expérience. Personne ne disait que c’était l’espace de Hilbert qui allait rendre compte de la physique quantique. C’est bien la contingence du monde qui est importante et c’est ce que les Grecs n’avaient pas saisi.
Les Chrétiens le peuvent. Le monde est contingent à partir du moment où plusieurs mondes étaient possibles. Lorsque Dieu crée le monde, dans la théologie classique, il y a son entendement et sa volonté. Sa volonté est arbitraire. Donc le monde est complètement arbitraire. Donc il est contingent, donc il faut l’expérience.
Le C. des P.
Une réconciliation entre Dieu et la science ?
EK.
Je suis d’accord, l’expérience est le seul moyen d’accès à cette contingence…
MS
Et cela c’est une idée parfaitement opposée à tout ce que l’on dit aujourd’hui sur le créationnisme,
EK
C’est vrai que toutes les mathématiques ne sont pas utiles. Il y a des mathématiques stériles, plus ou moins efficaces… des mathématiques que l’on oublie… Heisenberg redécouvre la mécanique des matrices lorsqu’il en a besoin pour comprendre le spectre de l’hydrogène.
Le C. des P.
Oui mais finalement, qu’est-ce qui permet de savoir si l’on est plus proche du réel ?
MS
Rien. Car si l’on parle du réel physique, il est en permanence en cours d’élaboration, de construction.. Quand Etienne expérimentait sur les accélérateurs de particules du CERN à Genève il construisait un réel différent de celui que l’on rencontre dans la Creuse, quand on pêche à la ligne.
EK
Oui mais les deux réels sont en relation
MS.
Mais ce lien est métaphysique.
EK.
On peut défendre l’idée que des créatures de la physique, comme les quarks les électrons n’existent pas en eux-mêmes mais sont des constructions, des produits de notre représentation du réel.
MS
Vous voyez, on est tout le temps en train de faire l’essuie glace entre l’idéalisme et le réalisme. Et quand on a fait notre livre, on l’a appelé Paysages (éditions du Pommier), pour éviter de dire image, ce qui est une représentation, et pour ne pas dire photographie, qui aurait été le réel.
Oui, une image est fabriquée par une machine à faire des images, c’est une représentation. Mais dans notre esprit, y’a pas photo. Une photographie n’existe pas par elle-même, c’est le réel qu’elle est sensée montrer.
Michel Serres, Philosophe
Etienne Klein, Physicien au CEA
(Certaines parties parues dans le Figaro en 2001)
cascade
Le Complot des Papillons :
Philip K. Dick écrivait que le réel c’est ce qui reste lorsque l’on ne croit plus en rien de ce que l’on perçoit. Pour vous, qu’est le réel de la philosophie, celui de la science ?
Michel Serres
Quand on emploie le terme de réel, on ne sait pas de quoi l’on parle.
À première vue, il y a le réel de la perception, le réel de la passion, qui dépend de l’âge, de la culture, qui dépend du moment de l’histoire. Le réel d’un ancien Grec ce n’est pas le même que celui d’un contemporain et ainsi de suite…
La question du réel a divisé les écoles philosophiques en deux depuis plusieurs millénaires. C’est deux écoles sont l’idéalisme et le réalisme. L’idéaliste dit que le réel c’est notre représentation du monde, notre idée… Le réaliste dit le réel extérieur à ma représentation, il existe.
Mais ces deux décisions sont asymétriques. La première est toujours démontrable. On peut toujours montrer que le réel est une représentation, puisque la démonstration est incluse dans la proposition. Tandis que dire que le réel est extérieur à nos représentations n’est jamais démontrable. C’est un acte de foi. Et précisément, la science est fondée sur cet acte de foi.
La science a pour but de toujours faire échapper le réel dont elle parle aux représentations. C’est un problème asymptotique, elle n’y parvient jamais…
Une expérience a toujours besoin d’une théorie et la théorie a toujours besoin d’une expérience. Et ce mélange théorie-expérience fait un réel qui est toujours mêlé de représentation. A mesure que la science avance le réel recule et devient une sorte de point asymptotique vers lequel la représentation avance.
Le C. des P.
De ce point de vue la science avance ?
MS
Sur la question du réel, ce qui avance c’est un certain nombre de saisies, de techniques perceptives ou expérimentales. Surtout ce qui avance ce sont les techniques de mesure. Quand on en est au nanomètre on est, me semble-t-il, plus proche du réel que lorsqu’on était au centimètre. Mais de quel réel s’agit-il ?
EK
Naïvement on pourrait dire que le réel de la physique c’est la matière. Et en gros il y a deux sortes de contacts possibles avec elle.. Le contact direct : on observe les choses, les matériaux… On tape sur cette table, on constate qu’elle résiste. Et l’on tire de ces contacts le sentiment d’un présence matérielle qui est non alimentée par une représentation. Et puis il y a une deuxième possibilité de contact avec la matière qui est celle qui consiste à remplacer la matière par son double, par une mise en concept qui procède d’une stratégie de l’évitement. On contourne la matière pour essayer non pas de la regarder telle qu’elle est mais de la représenter par des concepts, des formalismes, des idées. Au bout du compte on espère qu’au bout de cette galipette conceptuelle on aboutira à une rencontre plus véritable que celle que l’on a de prime abord.
Michel dit que lorsque l’on est à l’échelle du nanomètre on a une matière plus réelle que celle au centimètre. Je n’en suis pas certain… L’une des questions que pose la physique aujourd’hui et notamment la physique quantique (utilisée pour décrire les phénomènes subatomiques ndlr) c’est le lien qu’il y a entre le réel empirique, tel qu’il se donne, celui des expériences, et puis la représentation que l’on en fait. Et là, on retrouve la dichotomie entre le réalisme, l’idéalisme et la démarche scientifique quand à l’accès au réel.
Le C. des P.
De quelle manière la physique pose-t-elle cette question du lien entre réel et imaginaire ?
EK
Le point de départ de la physique quantique consiste à dire que l’on va représenter les états physiques dans des espaces abstraits (par des vecteurs d’état) qui ont un nombre infini de dimensions, brefs qui ne sont pas l’identique de l’espace physique dans lequel ont lieu les phénomènes. La représentation des systèmes se situe donc dans un espace qui s’est émancipé de l’espace physique. C’est grâce à cette émancipation que l’on peut prédire correctement des résultats d’expériences qui vont pourtant se dérouler dans l’espace physique !
En choisissant ce type d’espace par nécessité, on a créé une brèche entre le réel empirique, le monde des expériences, et puis la représentation abstraite que nous en donnons
C’est dans cette brèche que viennent s’engouffrer les questions sur le lien entre la représentation abstraite et le résultat d’expériences qui ont lieu dans un réel à trois dimensions.
C’est quand même une expérience bouleversante pour un physicien que de faire des calculs dans ce que l’on appelle un espace de Hilbert, des calculs complètement abstraits qui finissent par arriver à un nombre réel qui correspond à un résultat possible d’expérience pour voir que c’est dans cet espace mathématique qu’il a fallu faire les calculs pour trouver le résultat de l’expérience concrète.
La représentation que propose la physique théorique aujourd’hui ce n’est pas une sténographie de l’expérience mais au contraire quelque chose qui s’émancipe de la réalité physique immédiate, s’en détourne complètement et y revient par le détour de règles de correspondance.
Mais cette émancipation est la cause de toutes les question épistémologiques que pose la physique aujourd’hui.
Le C. des P.
Mais au fur et à mesure que l’on avance, le réel se dérobe tout de même, on découvre toujours davantage de particules, de propriétés…
EK
L’idée que ce détour par un espace abstrait permet une rencontre plus profonde avec la matière est une idée qui est sous-jacente à la démarche scientifique du XXème siècle. On a toujours voulu aller vers le plus petit, le plus élémentaire au motif que c’est au niveau élémentaire que les lois fondamentales se révèlent dans leur simplicité extrême. Mais on peut contester ce point de vue. Il y a un renouveau de la physique aujourd’hui plus légère qui conteste l’idée que c’est aux hautes énergies et aux petites distances que le réel se donne vraiment. Car en fait quand on regarde les propriétés ordinaire que l’on attribue à la matière, comme la solidité, la localisation, la masse, la pénétrabilité, des trajectoires définies dans l’espace…, à petite échelle, celle des particules élémentaires, aucune de ces propriétés ne subsiste. Cela n’aurait pas de sens de dire qu’un électron a une texture bien définie, qu’il est impénétrable. Bref toutes les propriétés naturelles, spontanées que l’on attribue à la matière sont perdues au niveau des particules élémentaires.
Le C. des P.
Le réel s’évade encore…
MS
La matière qu’Etienne a pris pour naturelle, ou que l’espace physique qu’il prend pour naturel est déjà une élaboration, celle de la physiquedu passé. Le mot matière a mis longtemps a être mis en place, et les caractéristiques qu’il donne de la matière, la masse, l’impénétrabilité, les trajectoires, ont mis très très longtemps a apparaître en physique et en mécanique.
EK
L’impénétrabilité a été inventée par Blaise Pascal.
Le C. des P.
Et la masse, c’est Galilée...
MS
Oui c’est Galilée, mais masse, matière c’est un mot très ancien qui veut dire le bois. Materies en latin, c’est le bois. Et la racine, c’est matter, la mère. Et cette notion qui parait naturelle, on s’aperçoit que c’est un concept extraordinairement raffiné, venu du fond des temps… Matière c’est Aristote qui le trouve, puis le XVIIème siècle le reprend...
Lorsque les physiciens disent on s’émancipe de l’espace naturel, déjà cet espace naturel était un espace des physiciens anciens, qui s’étaient déjà émancipés. Comme la matière s’était émancipé du bois, et le bois de la mère, et ainsi de suite. On a des strates d’émancipation successives. Quand nos amis font la main à la pâte, quand ils disent la pâte, ils croient parler du naturel, mais en fait ils font référence à une notion qui vient de la physique de papa…
Quand un physicien dit naturel, c’est précisément la physique de papa qu’il invoque….
drop
Le C. des P.
En quoi réside le mystère de la mathématisation, de cette abstraction ? Ce qui est incompréhensible, c’est que le monde soit compréhensible, disait Einstein…
MS On fait gloire à Einstein de cela, mais Appolonius de Perge (Mathématicien grec, 200 av.J.-C.) posait déjà la question : comment se fait-il que les cieux obéissent à nos modèles géométriques ? Retomber sur les nombres ordinaires en venant de l’espace mathématique de Hilbert, comment cela se fait-il ? Einstein dit que c’est incompréhensible, avant lui, Kant disait que c’était un miracle…
EK
Quand on regarde la théorie quantique des champs, le fait qu’elle fonctionne aussi bien est quelque chose de profondément troublant, impressionnant. Cette efficacité mérite d’être interrogée. Dire que c’est un miracle n’est pas une attitude conforme à la raison.
Dominique Lambert propose des idées qui sont que l’efficacité des mathématiques est raisonnable car elles construisent des invariants et la notion d’invariant est constitutive de la notion d’objet. Si l’on prend un électron, tous les discours mathématique sur lui diront toujours que c’est un électron. Il est invariant, quelque soient les mathématiques que l’on emploie, comme si je fais le tour de Michel Serres, je reconnaitrai toujours Michel Serres. Sa réalité vient du fait qu’elle de dépend pas du point de vue que j’ai sur lui. Cela, les mathématiques savent l’exprimer par le biais des symétries.
Le C. des P.
La physique est donc en train de devenir une pensée mathématique ?
MS
Non. Les mathématiques contiennent des caractéristiques qui permettent de penser le monde physique, mais on ne sait jamais, dans une expérience donnée, quelles mathématiques vont fonctionner… Et là, j’ai quelque chose à dire d’un peu important. Si tu lis les Grecs, par exemple le Timée de Platon, tu t’aperçois qu’ils veulent déduire la physique des mathématiques. Alors ils échouent à faire de la physique, car ils croient précisément que l’on peut déduire les expériences des mathématiques. C’est comme cela qu’ils ont raté la physique.
On a récupéré la physique ensuite, en faisant des expériences. Pourquoi ? Il fallait avoir l’idée du contingent. C’est-à-dire qu’il y a un endroit du monde dont on ne sait pas quel endroit des mathématiques va en rendre compte.
Et le contingent est là pour une raison très simple, c’est parce que le monde a été créé. Et cela ne pouvait avoir lieu que dans une vision judéo-chrétienne du monde, avec le créationnisme. Tout le monde croit que le créationnisme est un déductionnisme… Non c’est un choix contingent . Par conséquent on ne sait jamais quel lieux des mathématiques rendra compte du lieu de l’expérience. Personne ne disait que c’était l’espace de Hilbert qui allait rendre compte de la physique quantique. C’est bien la contingence du monde qui est importante et c’est ce que les Grecs n’avaient pas saisi.
Les Chrétiens le peuvent. Le monde est contingent à partir du moment où plusieurs mondes étaient possibles. Lorsque Dieu crée le monde, dans la théologie classique, il y a son entendement et sa volonté. Sa volonté est arbitraire. Donc le monde est complètement arbitraire. Donc il est contingent, donc il faut l’expérience.
Le C. des P.
Une réconciliation entre Dieu et la science ?
EK.
Je suis d’accord, l’expérience est le seul moyen d’accès à cette contingence…
MS
Et cela c’est une idée parfaitement opposée à tout ce que l’on dit aujourd’hui sur le créationnisme,
EK
C’est vrai que toutes les mathématiques ne sont pas utiles. Il y a des mathématiques stériles, plus ou moins efficaces… des mathématiques que l’on oublie… Heisenberg redécouvre la mécanique des matrices lorsqu’il en a besoin pour comprendre le spectre de l’hydrogène.
Le C. des P.
Oui mais finalement, qu’est-ce qui permet de savoir si l’on est plus proche du réel ?
MS
Rien. Car si l’on parle du réel physique, il est en permanence en cours d’élaboration, de construction.. Quand Etienne expérimentait sur les accélérateurs de particules du CERN à Genève il construisait un réel différent de celui que l’on rencontre dans la Creuse, quand on pêche à la ligne.
EK
Oui mais les deux réels sont en relation
MS.
Mais ce lien est métaphysique.
EK.
On peut défendre l’idée que des créatures de la physique, comme les quarks les électrons n’existent pas en eux-mêmes mais sont des constructions, des produits de notre représentation du réel.
MS
Vous voyez, on est tout le temps en train de faire l’essuie glace entre l’idéalisme et le réalisme. Et quand on a fait notre livre, on l’a appelé Paysages (éditions du Pommier), pour éviter de dire image, ce qui est une représentation, et pour ne pas dire photographie, qui aurait été le réel.
Oui, une image est fabriquée par une machine à faire des images, c’est une représentation. Mais dans notre esprit, y’a pas photo. Une photographie n’existe pas par elle-même, c’est le réel qu’elle est sensée montrer.
19.6.07
Quelle année est-il ?
Ah mais ! Est-ce cette chaleur qui me donne de tels désirs de glaces ? Voici que je vous propose un autre texte polaire. Il s'agit de la première contribution d'un "invité" dans ce blog. Une manière d'en inviter d'autres. Vous ? Cet article rédigé par Nicole Van de Kerchove est publié ce mois-ci dans "Carré Voiles", fort élégante revue marine en vente par nos kiosques.
Je trouve ce témoignage profond. La navigatrice immobile, cernée par le crépuscule polaire y livre la sensation du temps, vécue à bord du voilier polaire "Vagabond". Elle devait effectuer une bonne part de l'hivernage, la "prise dans la banquise" du navire d'acier, sur la côte sud du Spitzberg, d'octobre à décembre 2006. Seule à bord. Pardon. Nicole vivait avec trois chiens, encerclée d'ours (eh oui), d'aurores boréales et de vilains glaçons qui pilonnaient la coque aux humeurs du vent. Une folle horde quoi.
LE TEMPS DES GLACES
Par Nicole Van de Kerchove
L’horloge sert à peser les retards. Il arrive que l’horloge tombe en panne et comme l’auto perd de l’huile, l’horloge perd du temps. »
Mon enfance ne m’a pas appris les heures. Les seules à respecter étaient aussi rares que la leçon de piano du lundi, ou un occasionnel rendez-vous chez le dentiste. Je n’allais pas à l’école. Plus tard, mes différentes occupations n’ont pas non plus été régies par des horaires. Les quelques fois où j’ai travaillé à heures fixes m’ont fait le même effet que si j’avais dû marcher sur une corde raide sans avoir appris. Et quand j’ai su, cela m’a profondément déprimée.
Que se passe-t-il quand notre plus grande horloge, le soleil, s’en va ?
Imaginons vingt-quatre heures d’obscurité. Que reste-t-il pour mettre en ordre quelque chose qui ressemble à des journées… Et cela est-il important ? Ou au contraire l’occasion de laisser glisser le temps sans le nommer matin ou nuit, se laisser flotter dans un rythme qui ne sera plus dicté par un astre ni par une vie sociale, puisque je serai seule. La tentation est grande de goûter cette nouvelle sorte de liberté. Mais jusqu’où vais-je aimer l’inconnu…
Je veux bien me perdre dans les bois, mais avec un GPS au fond de ma poche. Vivre sans nommer le temps, ce doit être un peu pareil, on se perd.
Ce sont ces questions que je me pose en arrivant par 77°53 nord, au Spitzberg, où le soleil est déjà bas sur l’horizon en cette fin du mois de septembre. Le jour va décroître d’une demi-heure par 24 heures !
Je vais séjourner trois mois sur un bateau pour un voyage immobile, dans une mer de glace.
Lorsque j’arrive à Longyearbyen en cette fin d’été, comment ne pas remarquer la course insolite du soleil. Au lieu de se lever à l’Est, de faire un grand tour en haut du ciel pour aller se coucher à l’Ouest, il fait un cercle presque à l’horizontale, juste au-dessus des montagnes, sur 360 degrés. La belle lumière du soir qui fait le bonheur des photographes reste pratiquement identique toute la journée. Elle caresse les sommets enneigés de rayons dorés, roses, mauves.
Lorsque le soleil disparaît pour sa longue nuit australe, la lune arrive et prend le même chemin à tourner en rond au ras des sommets au lieu de s’élever dans le ciel.
Le matin du départ de l’équipage, la question de savoir si je vais dériver dans l’absence de repères est vite mise de côté. Je sens l’urgence de me cramponner à la date comme à un axe vital à mon isolement. Et aux heures, qui vont devenir une présence.
Mes vigilants gardiens du temps sont le calendrier que j’ai dessiné, et le journal que je tiens. Pourtant, un jour, il s’y glisse une erreur ! Je fais appel à l’ordinateur, qui ne me livre aucune réponse : pas plus que le téléphone portable, il n’a été programmé à la bonne date. Surgit un flou inquiétant. Je calcule sur mes doigts, je fouille fébrilement dans mes affaires pour retrouver le vieux billet d’avion, le ticket de caisse de mes achats en arrivant…
Autant de réalités palpables pour cerner l’insaisissable qui se dérobe encore en refusant de faire correspondre le bon jour avec la bonne date. Mais finalement, je crois que je le tiens ! C’est alors que le téléphone sonne et que Jean-François me dit sans l’ombre d’une hésitation que nous sommes la veille. Mes certitudes tombent comme un château de cartes, bizarrement je me sens très mal de revivre « hier » !
Ce n’est que bien plus tard que j’apprendrai que Jean-François s’est trompé ! Pareil mais dans l’autre sens : en sautant une case sur le calendrier, je vais ressentir le manque d’une journée jamais vécue.
Tout cela prend trop d’important pour passer inaperçu et je me regarde avec sévérité. En parlant de temps, il est temps de faire quelque chose.
Je vais apprivoiser l’absence de repères. Petit à petit, me laisser glisser vers la confiance de circuler sans la béquille des heures. Il suffisait d’essayer, c’est beaucoup plus simple que ce que je croyais. Le manque devient rassurant : on n’a plus besoin de ce que l’on n’a pas, au lieu d’avoir peur de ne plus l’avoir. Même que Monsieur de la Palice serait d’accord avec moi !
Cela ne s’est pas fait d’un coup. Comme on rentre dans un bain en augmentant petit à petit la température, je me suis habituée à ne plus regarder ma montre, jusqu’à ce que m’apparaisse la facilité de ne plus avoir à tenir ce régiment d’heures dans l’ordre des choses à faire.
(Il faut dire que j’ai un handicap certain à la base : je suis du signe de la Vierge. Et les Vierges, ça range tout…)
TEMPS
Ma dernière horloge a disparu avec l’ultime quartier de lune.
La nuit polaire.
Le noir échappe à toutes les mesures de temps.
Je l’ai laissé s’enfuir, se noyer dans l’obscurité, j’y ai plongé doucement avec la sensation d’un doux vertige du « rien ».
C’est comme de sauter d’une falaise vers un sol qui n’existe pas. Vertige, appréhension, puis on se décontracte et on plane comme un oiseau sans ailes et sans corps.
Le sentiment de chute petit à petit s’efface jusqu’à disparaître, dernière sensation de mouvement. C’était l’ultime vestige du temps qui passe, et à travers lui, de notre existence.
Ne plus exister, voilà, c’est ça. On triche. On peut tricher un certain temps.
Mais c’est sans compter avec l’humain qui sommeille en nous. Cela fait des millions d’années que le soleil existe et nous a imposé son rythme, ça ne s’oublie pas en quelques semaines.
Et sans savoir pourquoi, dans notre chute immobile, voilà que l’on commence à essayer de se rattraper aux branches, aux heures, pour se rassurer avec une mesure de temps qui atteste de notre existence. Pour arrêter notre disparition.
C’est la fin de cette intrusion dans l’infini.
Les vagues mais toujours présentes horloges du temps :
Le sommeil
Le niveau du baril d’eau
Les chiens qui aboient pour la soupe
Le nombre décroissant des carottes
La faim me direz-vous. Eh bien non, elle profite de la relative inaction pour se faire oublier.
Les heures sont donc revenues, mais tout en douceur et chacun chez soi : elles ont gardé leur indépendance et moi la mienne. On s’entend très bien comme ça. Le temps s’en va son petit bonhomme de chemin, tantôt je l’accompagne, tantôt il s’occupe tout seul. En tout cas, il n’essaie plus de m’emprisonner et je ne cherche moins à le discipliner. Nous avons fait de gros progrès depuis le début de ce séjour !
Le matin, le temps pétille, il est pressé. Le temps n’a pas le temps. Je dois le sermonner pour qu’il me laisse en paix faire chauffer l’eau du café, noter les relevés météo et écrire.
Il a tout de même réussi à m’échapper car le milieu de la journée est bien passé lorsque je mets la soupe à chauffer sur le poêle. Mais là, je sais que je vais le rattraper, le temps. Il commence à traîner la savate en milieu d’après-midi et je dois même le tirer un peu pour arriver à l’heure du DVD. Un film que je regarde sur mon ordinateur, une récréation que le temps va traverser au pas de course.
C’est en soirée qu’il devient pénible. Un pot de colle qui retient les aiguilles de la montre. Ce sont les heures de plomb. Je le traîne derrière moi vers les souvenirs, puis les projets, même s’il essaie de me faire des crocs en jambes pour m’aiguiller vers des soucis qu’il adore dramatiser. Je ne me laisse pas faire ! Pour endormir le temps, j’allume la lumière et je lis.
Il est coriace et arrive à résister encore pendant des heures, mais je sais que j’aurai le dernier mot et qu’il ira se perdre dans le sommeil.
De temps en temps aussi, il y a les heures immobiles. Elles surgissent n’importe quand et sans prévenir. Celles-là, pour s’en débarrasser, il faut surtout faire comme si on ne les remarquait pas. Comme un caprice d’enfant, si on y répond, c’est sans fin. Tourner le dos, s’activer, trouver des choses à faire, et au bout d’un moment, les heures immobiles se remettront en route toutes seules.
Mes journées ont ainsi repris un petit air civilisé, presque ordonné. C’est mieux pour mon proche retour au pays des heures, des rendez-vous, des temps, des juste à temps, des pas le temps, des trop tard et des quelle heure est-il ?
Mais parfois, je pense à la manière dont les premiers Maoris imaginaient leurs voyages. Pour eux, les îles et l’océan étaient en continuel mouvement. Il fallait juste ramer dans la pirogue pour assurer le sur-place, jusqu’au passage de l’île.
Peut-être le temps est-il parfaitement immobile. Je me promène, je marche sur sa trame, seule à créer un mouvement qui s’inscrit dans une durée. Là, on parle de temps. Mais le temps, c’est lui, ou moi ?
Je trouve ce témoignage profond. La navigatrice immobile, cernée par le crépuscule polaire y livre la sensation du temps, vécue à bord du voilier polaire "Vagabond". Elle devait effectuer une bonne part de l'hivernage, la "prise dans la banquise" du navire d'acier, sur la côte sud du Spitzberg, d'octobre à décembre 2006. Seule à bord. Pardon. Nicole vivait avec trois chiens, encerclée d'ours (eh oui), d'aurores boréales et de vilains glaçons qui pilonnaient la coque aux humeurs du vent. Une folle horde quoi.
LE TEMPS DES GLACES
Par Nicole Van de Kerchove
L’horloge sert à peser les retards. Il arrive que l’horloge tombe en panne et comme l’auto perd de l’huile, l’horloge perd du temps. »
Mon enfance ne m’a pas appris les heures. Les seules à respecter étaient aussi rares que la leçon de piano du lundi, ou un occasionnel rendez-vous chez le dentiste. Je n’allais pas à l’école. Plus tard, mes différentes occupations n’ont pas non plus été régies par des horaires. Les quelques fois où j’ai travaillé à heures fixes m’ont fait le même effet que si j’avais dû marcher sur une corde raide sans avoir appris. Et quand j’ai su, cela m’a profondément déprimée.
Que se passe-t-il quand notre plus grande horloge, le soleil, s’en va ?
Imaginons vingt-quatre heures d’obscurité. Que reste-t-il pour mettre en ordre quelque chose qui ressemble à des journées… Et cela est-il important ? Ou au contraire l’occasion de laisser glisser le temps sans le nommer matin ou nuit, se laisser flotter dans un rythme qui ne sera plus dicté par un astre ni par une vie sociale, puisque je serai seule. La tentation est grande de goûter cette nouvelle sorte de liberté. Mais jusqu’où vais-je aimer l’inconnu…
Je veux bien me perdre dans les bois, mais avec un GPS au fond de ma poche. Vivre sans nommer le temps, ce doit être un peu pareil, on se perd.
Ce sont ces questions que je me pose en arrivant par 77°53 nord, au Spitzberg, où le soleil est déjà bas sur l’horizon en cette fin du mois de septembre. Le jour va décroître d’une demi-heure par 24 heures !
Je vais séjourner trois mois sur un bateau pour un voyage immobile, dans une mer de glace.
Lorsque j’arrive à Longyearbyen en cette fin d’été, comment ne pas remarquer la course insolite du soleil. Au lieu de se lever à l’Est, de faire un grand tour en haut du ciel pour aller se coucher à l’Ouest, il fait un cercle presque à l’horizontale, juste au-dessus des montagnes, sur 360 degrés. La belle lumière du soir qui fait le bonheur des photographes reste pratiquement identique toute la journée. Elle caresse les sommets enneigés de rayons dorés, roses, mauves.
Lorsque le soleil disparaît pour sa longue nuit australe, la lune arrive et prend le même chemin à tourner en rond au ras des sommets au lieu de s’élever dans le ciel.
Le matin du départ de l’équipage, la question de savoir si je vais dériver dans l’absence de repères est vite mise de côté. Je sens l’urgence de me cramponner à la date comme à un axe vital à mon isolement. Et aux heures, qui vont devenir une présence.
Mes vigilants gardiens du temps sont le calendrier que j’ai dessiné, et le journal que je tiens. Pourtant, un jour, il s’y glisse une erreur ! Je fais appel à l’ordinateur, qui ne me livre aucune réponse : pas plus que le téléphone portable, il n’a été programmé à la bonne date. Surgit un flou inquiétant. Je calcule sur mes doigts, je fouille fébrilement dans mes affaires pour retrouver le vieux billet d’avion, le ticket de caisse de mes achats en arrivant…
Autant de réalités palpables pour cerner l’insaisissable qui se dérobe encore en refusant de faire correspondre le bon jour avec la bonne date. Mais finalement, je crois que je le tiens ! C’est alors que le téléphone sonne et que Jean-François me dit sans l’ombre d’une hésitation que nous sommes la veille. Mes certitudes tombent comme un château de cartes, bizarrement je me sens très mal de revivre « hier » !
Ce n’est que bien plus tard que j’apprendrai que Jean-François s’est trompé ! Pareil mais dans l’autre sens : en sautant une case sur le calendrier, je vais ressentir le manque d’une journée jamais vécue.
Tout cela prend trop d’important pour passer inaperçu et je me regarde avec sévérité. En parlant de temps, il est temps de faire quelque chose.
Je vais apprivoiser l’absence de repères. Petit à petit, me laisser glisser vers la confiance de circuler sans la béquille des heures. Il suffisait d’essayer, c’est beaucoup plus simple que ce que je croyais. Le manque devient rassurant : on n’a plus besoin de ce que l’on n’a pas, au lieu d’avoir peur de ne plus l’avoir. Même que Monsieur de la Palice serait d’accord avec moi !
Cela ne s’est pas fait d’un coup. Comme on rentre dans un bain en augmentant petit à petit la température, je me suis habituée à ne plus regarder ma montre, jusqu’à ce que m’apparaisse la facilité de ne plus avoir à tenir ce régiment d’heures dans l’ordre des choses à faire.
(Il faut dire que j’ai un handicap certain à la base : je suis du signe de la Vierge. Et les Vierges, ça range tout…)
TEMPS
Ma dernière horloge a disparu avec l’ultime quartier de lune.
La nuit polaire.
Le noir échappe à toutes les mesures de temps.
Je l’ai laissé s’enfuir, se noyer dans l’obscurité, j’y ai plongé doucement avec la sensation d’un doux vertige du « rien ».
C’est comme de sauter d’une falaise vers un sol qui n’existe pas. Vertige, appréhension, puis on se décontracte et on plane comme un oiseau sans ailes et sans corps.
Le sentiment de chute petit à petit s’efface jusqu’à disparaître, dernière sensation de mouvement. C’était l’ultime vestige du temps qui passe, et à travers lui, de notre existence.
Ne plus exister, voilà, c’est ça. On triche. On peut tricher un certain temps.
Mais c’est sans compter avec l’humain qui sommeille en nous. Cela fait des millions d’années que le soleil existe et nous a imposé son rythme, ça ne s’oublie pas en quelques semaines.
Et sans savoir pourquoi, dans notre chute immobile, voilà que l’on commence à essayer de se rattraper aux branches, aux heures, pour se rassurer avec une mesure de temps qui atteste de notre existence. Pour arrêter notre disparition.
C’est la fin de cette intrusion dans l’infini.
Les vagues mais toujours présentes horloges du temps :
Le sommeil
Le niveau du baril d’eau
Les chiens qui aboient pour la soupe
Le nombre décroissant des carottes
La faim me direz-vous. Eh bien non, elle profite de la relative inaction pour se faire oublier.
Les heures sont donc revenues, mais tout en douceur et chacun chez soi : elles ont gardé leur indépendance et moi la mienne. On s’entend très bien comme ça. Le temps s’en va son petit bonhomme de chemin, tantôt je l’accompagne, tantôt il s’occupe tout seul. En tout cas, il n’essaie plus de m’emprisonner et je ne cherche moins à le discipliner. Nous avons fait de gros progrès depuis le début de ce séjour !
Le matin, le temps pétille, il est pressé. Le temps n’a pas le temps. Je dois le sermonner pour qu’il me laisse en paix faire chauffer l’eau du café, noter les relevés météo et écrire.
Il a tout de même réussi à m’échapper car le milieu de la journée est bien passé lorsque je mets la soupe à chauffer sur le poêle. Mais là, je sais que je vais le rattraper, le temps. Il commence à traîner la savate en milieu d’après-midi et je dois même le tirer un peu pour arriver à l’heure du DVD. Un film que je regarde sur mon ordinateur, une récréation que le temps va traverser au pas de course.
C’est en soirée qu’il devient pénible. Un pot de colle qui retient les aiguilles de la montre. Ce sont les heures de plomb. Je le traîne derrière moi vers les souvenirs, puis les projets, même s’il essaie de me faire des crocs en jambes pour m’aiguiller vers des soucis qu’il adore dramatiser. Je ne me laisse pas faire ! Pour endormir le temps, j’allume la lumière et je lis.
Il est coriace et arrive à résister encore pendant des heures, mais je sais que j’aurai le dernier mot et qu’il ira se perdre dans le sommeil.
De temps en temps aussi, il y a les heures immobiles. Elles surgissent n’importe quand et sans prévenir. Celles-là, pour s’en débarrasser, il faut surtout faire comme si on ne les remarquait pas. Comme un caprice d’enfant, si on y répond, c’est sans fin. Tourner le dos, s’activer, trouver des choses à faire, et au bout d’un moment, les heures immobiles se remettront en route toutes seules.
Mes journées ont ainsi repris un petit air civilisé, presque ordonné. C’est mieux pour mon proche retour au pays des heures, des rendez-vous, des temps, des juste à temps, des pas le temps, des trop tard et des quelle heure est-il ?
Mais parfois, je pense à la manière dont les premiers Maoris imaginaient leurs voyages. Pour eux, les îles et l’océan étaient en continuel mouvement. Il fallait juste ramer dans la pirogue pour assurer le sur-place, jusqu’au passage de l’île.
Peut-être le temps est-il parfaitement immobile. Je me promène, je marche sur sa trame, seule à créer un mouvement qui s’inscrit dans une durée. Là, on parle de temps. Mais le temps, c’est lui, ou moi ?
Terreurs et bonheurs polaires
Si vous vous rendez dans le grand Nord mystérieux, quelques utiles détails :
- Non, nanuk ne cache pas sa truffe noire pour approcher les phoques et les croquer. C'est une légende qu'ont répandu joyeux drilles et ceux qui n'ont jamais vu d'ours de près.
- Mais nanuk sait chasser. Dans le Nord, quand on hiverne, et que les toilettes sont à 50 mètres de la cabane, on s'y rend à deux, avec les lampes et le fusil, et les chiens, et l'on regarde bien dans les coins. Nanouk est affamé, à l'approche du printemps. Alors si le coup de la truffe veut dire "attention à vos fesses", continuons de le colporter et rions (jaune) de notre étrange ami.
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- Non le poil de l'ours n'est pas blanc. Il est incolore, sans pigment (et souvent sale). Comme nos cheveux blancs. C'est l'effet de la lumière sur ce poil transparent (diffusion) qui crée cet effet de lait.
- Qui n'a pas lu "La vierge froide et autres racontars" (Jorn Riel, chez 10/18) devra l'emporter dans son sac, pour les longues séances de veille solitaires (le guet des ours). Je recommande particulièrement la dernière nouvelle : "Le Roi Oscar". Bon il n'est pas question d'ours, dans celle-ci. Mais dans cette rafale d'humour on soupèsera l'effet que produit l'isolement et la longue plainte du vent. Hommes fragiles à la viande délicieuse, méfiez-vous !
- Non, nanuk ne cache pas sa truffe noire pour approcher les phoques et les croquer. C'est une légende qu'ont répandu joyeux drilles et ceux qui n'ont jamais vu d'ours de près.
- Mais nanuk sait chasser. Dans le Nord, quand on hiverne, et que les toilettes sont à 50 mètres de la cabane, on s'y rend à deux, avec les lampes et le fusil, et les chiens, et l'on regarde bien dans les coins. Nanouk est affamé, à l'approche du printemps. Alors si le coup de la truffe veut dire "attention à vos fesses", continuons de le colporter et rions (jaune) de notre étrange ami.
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- Non le poil de l'ours n'est pas blanc. Il est incolore, sans pigment (et souvent sale). Comme nos cheveux blancs. C'est l'effet de la lumière sur ce poil transparent (diffusion) qui crée cet effet de lait.
- Qui n'a pas lu "La vierge froide et autres racontars" (Jorn Riel, chez 10/18) devra l'emporter dans son sac, pour les longues séances de veille solitaires (le guet des ours). Je recommande particulièrement la dernière nouvelle : "Le Roi Oscar". Bon il n'est pas question d'ours, dans celle-ci. Mais dans cette rafale d'humour on soupèsera l'effet que produit l'isolement et la longue plainte du vent. Hommes fragiles à la viande délicieuse, méfiez-vous !
18.6.07
Dans les pas de l'Ours ?
L'été. Le soleil de Minuit ! Certains iront aussi en zone polaire, pour de leurs yeux vérifier si la magnifique banquise polaire fond vraiment, sous l'effet de la canicule planétaire (Spitzberg, Groenland, Canada, Alaska, Sibérie, etc...) et si l'ours et son écosystème sont menacés. A propos. Avez vous pensé au risque de croiser un ours ? Non ?
Les Inuit assimilent la création de l'ours maritime, ou nanuk, à celle des autres animaux de l'Océan. Le mariage d’une jeune femme avec un chien provoque sa condamnation à être reléguée sur une île. En route, le père de la jeune Sedna n'y tient plus et la précipite à l’eau. Elle s’agrippe au canoe. Il lui tranche les doigts. Ces extrémités se muent alors en animaux : phoque, morse, baleine et ours. On raconte que depuis la perte de cette déesse faite femme, sa mère, nanuk ne peut aimer ces hommes qui lui sont si proches et si terribles. A leur égard, nanuk ne nourrit que désir de sang.
Il m'est arrivé d'"oublier" où je me trouvais, le temps d'un petit détour bien naturel, sur une grève du grand nord, et de devoir faire marche arrière, ma vie comme en film dans ma tête, avec gros nounours qui me regardait de biais. J'ai su ce jour-là que j'étais apétissant. Surtout, je vous livre ci-dessous une série de recommandations OFFICIELLES sur la "conduite à tenir" produite par les très renommés "Parcs du Canada".
photo
C'est pure poésie. Cela me fait toujours autant sourire. Imaginez la situation. Et d'ailleurs si l'on remplace "ours" par "chameau" ou "animal politique", et polaire par "des grandes villes" on sera paré pour toutes la latitudes. Voici cette perle qui en dit long, sur comment l'homme met ses pas dans ceux de l'ours.
FICHE : LA SECURITE AU PAYS DES OURS POLAIRES
EN GENERAL
• Lisez cette brochure.
• Soyez constamment sur vos gardes et conscient de ce qui se passe autour de vous.
• Au moyen de jumelles, scrutez régulièrement les environs. Soyez vigilant! Surveillez les indices de la présence d’ours polaires : pistes, excréments, creusements, carcasses d’animaux sauvages et tanières.
• Déplacez-vous pendant les heures de clarté et évitez les endroits où la visibilité est réduite.
• Soyez d’autant plus prudent le long de la côte où des rochers, des crêtes de pression (bossellement de la banquise sous l’effet de la compression), du bois de grève ou de la végétation, peuvent permettre à un ours de passer inaperçu.
• Le comportement de l’ours polaire est très différent de celui du grizzli ou de l’ours noir.
• L’ours polaire est un prédateur et chasse surtout le phoque tandis que le grizzli et l’ours noir se nourrissent principalement de plantes. Comme prédateur, l’ours polaire s’approchera des humains et de leur camp, et pourrait même les considérer comme une source de nourriture.
• Évitez les lieux de chasse des ours polaires.
• Le phoque est la proie principale de l’ours polaire et ces deux espèces fréquentent donc souvent les mêmes endroits.
• L’automne, l’hiver et tôt au printemps, la plupart des ours polaires chassent les phoques sur la banquise près du bord de la glace, des zones d’eau libre et le long de crêtes de pression. Les ours et les phoques fréquentent aussi les endroits où la glace
est mince ou craquée, tels que des crevasses de marée dans la banquise côtière ou au pied de glaciers. Il est plus facile pour les phoques de maintenir des trous d’aération dégagés dans ces endroits.
• Tôt au printemps, les femelles accompagnées d’oursons chassent surtout le long de crêtes de pression et de crevasses sur la banquise côtière (surtout dans les baies) où se trouvent les gîtes de naissance des phoques.
• L’été, quand l’eau est libre de glace et les ours polaires regagnent la terre ferme, ils chassent principalement le long de la côte, notamment sur des plages ou des îlots rocheux.
• Ne vous approchez jamais de la tanière d’un ours polaire.
CAMPEMENT :
• Campez loin de la côte, sur une butte ou une falaise offrant une bonne vue des environs.
• Évitez les endroits où le relief permettrait à un ours de se dissimuler. Méfiez-vous des virages masqués, des bancs de neige, des crêtes de pression et de tout autre élément obstruant la vue.
• Dressez les tentes en ligne droite plutôt qu’en cercle et placez-les au moins à 5m d’intervalle.
• Si un ours s’aventure dans le campement, il ne se sentira pas entouré et pourra se sauver sans se sentir menacé.
Ne dormez pas à la belle étoile.
Vous pourriez ressembler à un phoque et les ours polaires sont très curieux. Les gens dormant à la belle étoile se sont déjà fait attaquer.
Filtrez votre eau de vaisselle pour en extraire les particules d’aliments et mettez-les avec les déchets. Jetez l’eau de vaisselle à au moins 50 m de l’endroit où vous dormez, des rivières, des ruisseaux et des lacs. Conservez votre nourriture et vos déchets dans de contenants à l’épreuve des ours ou dans des sacs ou récipients hermétiques déposés sous des roches à un endroit visible de votre tente. Des casseroles placées dessus pourraient servir d’alarme. Si vous avez conçu un système d’avertissement, gardez la nourriture à l’intérieur de cette zone. NE GARDEZ AUCUNE nourriture dans votre tente.
Enterrez les excréments humains sous des roches à au moins 50 m d’où vous dormez ou mettez-les dans des contenants hermétiques.
Autour de votre tente, installez un système d’alarme portatif équipé d’un fil-piège ou d’un détecteur de mouvement pour vous avertir si un ours polaire s’aventure dans votre campement. Avant de partir pour votre séjour, communiquez avec Parcs Canada pour obtenir plus de renseignements à ce sujet.
Vous aimeriez peut-être apporter un chien, mais assurez-vous qu’il est familier avec les ours polaires.
Il est toujours mieux d’avoir plus d’un chien. Attachez-les à un piquet pour qu’ils ne courent pas vers vous lorsqu’ils veulent se faire protéger.
Désignez un veilleur pour signaler toute présence d’ours polaire dans les environs. Songez à déménager votre
campement le cas échéant.
VOUS RENCONTREZ UN OURS
• Assurez-vous que toutes les personnes comprennent ce qu’il faut faire.
• Restez calme et évaluez la situation.
• Que fait l’ours? Quel est son comportement?
Si l’ours ignore votre présence :
• reculez lentement et quittez l’endroit soit en retraçant vos pas soit en faisant un grand détour autour de l’ours. Ne courez pas et ne faites aucun mouvement brusque ou qui pourrait attirer l’attention de l’ours.
• demeurez en aval de l’ours par rapport au vent, si possible, pour qu’il ne puisse pas vous sentir et deviner votre présence
• ne quittez jamais l’ours des yeux.
Si l’ours est conscient de votre présence et montre des signes de curiosité, notamment :
• se déplace lentement en arrêtant souvent;
• se met sur les pattes arrière en humant l’air;
• se tient la tête haute, les oreilles tendues vers l’avant ou le côté;
• se balance la tête de gauche à droite;
• essaye de vous sentir en se mettant en aval par rapport au vent et en vous approchant de derrière;
PRENEZ LES MESURES SUIVANTES :
- aidez-le à comprendre que vous êtes un être humain;
- agitez les bras au-dessus de la tête et parlez d’une voix grave;
- déplacez-vous en amont pour qu’il puisse vous sentir.
Ne vous placez jamais entre une femelle et ses oursons.
Si une femelle accompagnée d’oursons est surprise de près ou si elle en est séparée, il est fort probable qu’elle attaquera afin de les défendre.
• Quittez l’endroit immédiatement.
• Demeurez en groupe.
• Défendez-vous si elle attaque.
Si vous avez surpris l’ours à une faible distance ou s’il se montre agité ou se comporte comme s’il était menacé, notamment :
Restez sur place et soyez prêt à vous défendre!
Il est rare qu’un ours polaire feigne d’attaquer.
Observez si notamment il se met à:
• râler, haleter, siffler, grogner ou laisser claquer ses mâchoires;
• marteler le sol de ses pattes antérieures;
• fixer une personne du regard;
• baisser la tête les oreilles rabattues.
PRENEZ LES MESURES SUIVANTES :
- ne le menacez pas. Ne criez pas et ne faites aucun mouvement brusque qui pourrait provoquer une attaque. Évitez de râler ou de siffler, car cela pourrait inciter l’ours à charger;
- évitez de le regardez directement dans les yeux;
- reculez tranquillement. NE COUREZ PAS;
- soyez prêt à utiliser des moyens de dissuasion.
Si l’ours montre qu’il tente de vous poursuivre ou de vous chasser, notamment :
• vous suivre ou vous encercler;
• vous approcher directement, d’un pas résolu et sans
peur;
• revenir vers vous après que vous l’avez effrayé;
• ou s’il paraît blessé, vieux ou maigre;
PRENEZ LES MESURES SUIVANTES :
- défendez-vous! Utilisez n’importe quel objet qui pourrait servir d’arme, regroupez-vous et faites beaucoup de bruit;
- NE COUREZ PAS;
- soyez prêt à utiliser des moyens de dissuasion.
Songez à utiliser tout objet pouvant servir d’arme, tel que des skis, des bâtons, des blocs de glace ou même des couteaux.
Demeurez en groupe. En restant en groupe et en posant certains gestes, tels que faire du bruit, sauter, agiter les bras et lancer des objets, il est possible d’intimider un ours et de le faire partir.
SE DEFENDRE
Dans les parcs nationaux du Canada, il est illégal de porter une arme à feu sans permis. Seules les personnes visées par la Convention définitive des Inuvialuit et par l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut peuvent se soustraire à ce règlement; elles peuvent porter des armes à feu lorsqu’elles participent à des activités traditionnelles dans les parcs nationaux se trouvant dans la région faisant l’objet des revendications territoriales.
Des produits anti-ours non mortels ont été conçus pour se protéger contre les ours noirs et les grizzlis, mais leur efficacité n’a pas encore été prouvée dans le cas des ours polaires.
Par conséquent, on ne peut en dépendre pour se protéger. Le meilleur moyen d’être en sécurité c’est d’éviter tout contact avec les ours polaires.
Songez à utiliser tout objet pouvant servir d’arme.
Assurez-vous de toujours laisser une voie de sortie à l’ours.
Portez des produits anti-ours sur vous et sachez les utiliser.
Produits anti-ours commerciaux :
• Les avertisseurs, notamment les avertisseurs pneumatiques et les avertisseurs sonores de type pistolet ou avec dispositif de lancement en forme de stylo, peuvent effrayer un ours.
• Le gaz poivré pourrait être efficace sur les ours polaires, mais il n’a pas encore fait l’objet d’essais approfondis. Sachez que par temps froid, le gaz poivré n’est pas efficace. Si vous vous en servez, soyez conscient de la direction du vent pour éviter que le gaz ne vous revienne dans la figure.
BONNE VISITE
Les Inuit assimilent la création de l'ours maritime, ou nanuk, à celle des autres animaux de l'Océan. Le mariage d’une jeune femme avec un chien provoque sa condamnation à être reléguée sur une île. En route, le père de la jeune Sedna n'y tient plus et la précipite à l’eau. Elle s’agrippe au canoe. Il lui tranche les doigts. Ces extrémités se muent alors en animaux : phoque, morse, baleine et ours. On raconte que depuis la perte de cette déesse faite femme, sa mère, nanuk ne peut aimer ces hommes qui lui sont si proches et si terribles. A leur égard, nanuk ne nourrit que désir de sang.
Il m'est arrivé d'"oublier" où je me trouvais, le temps d'un petit détour bien naturel, sur une grève du grand nord, et de devoir faire marche arrière, ma vie comme en film dans ma tête, avec gros nounours qui me regardait de biais. J'ai su ce jour-là que j'étais apétissant. Surtout, je vous livre ci-dessous une série de recommandations OFFICIELLES sur la "conduite à tenir" produite par les très renommés "Parcs du Canada".
photo
C'est pure poésie. Cela me fait toujours autant sourire. Imaginez la situation. Et d'ailleurs si l'on remplace "ours" par "chameau" ou "animal politique", et polaire par "des grandes villes" on sera paré pour toutes la latitudes. Voici cette perle qui en dit long, sur comment l'homme met ses pas dans ceux de l'ours.
FICHE : LA SECURITE AU PAYS DES OURS POLAIRES
EN GENERAL
• Lisez cette brochure.
• Soyez constamment sur vos gardes et conscient de ce qui se passe autour de vous.
• Au moyen de jumelles, scrutez régulièrement les environs. Soyez vigilant! Surveillez les indices de la présence d’ours polaires : pistes, excréments, creusements, carcasses d’animaux sauvages et tanières.
• Déplacez-vous pendant les heures de clarté et évitez les endroits où la visibilité est réduite.
• Soyez d’autant plus prudent le long de la côte où des rochers, des crêtes de pression (bossellement de la banquise sous l’effet de la compression), du bois de grève ou de la végétation, peuvent permettre à un ours de passer inaperçu.
• Le comportement de l’ours polaire est très différent de celui du grizzli ou de l’ours noir.
• L’ours polaire est un prédateur et chasse surtout le phoque tandis que le grizzli et l’ours noir se nourrissent principalement de plantes. Comme prédateur, l’ours polaire s’approchera des humains et de leur camp, et pourrait même les considérer comme une source de nourriture.
• Évitez les lieux de chasse des ours polaires.
• Le phoque est la proie principale de l’ours polaire et ces deux espèces fréquentent donc souvent les mêmes endroits.
• L’automne, l’hiver et tôt au printemps, la plupart des ours polaires chassent les phoques sur la banquise près du bord de la glace, des zones d’eau libre et le long de crêtes de pression. Les ours et les phoques fréquentent aussi les endroits où la glace
est mince ou craquée, tels que des crevasses de marée dans la banquise côtière ou au pied de glaciers. Il est plus facile pour les phoques de maintenir des trous d’aération dégagés dans ces endroits.
• Tôt au printemps, les femelles accompagnées d’oursons chassent surtout le long de crêtes de pression et de crevasses sur la banquise côtière (surtout dans les baies) où se trouvent les gîtes de naissance des phoques.
• L’été, quand l’eau est libre de glace et les ours polaires regagnent la terre ferme, ils chassent principalement le long de la côte, notamment sur des plages ou des îlots rocheux.
• Ne vous approchez jamais de la tanière d’un ours polaire.
CAMPEMENT :
• Campez loin de la côte, sur une butte ou une falaise offrant une bonne vue des environs.
• Évitez les endroits où le relief permettrait à un ours de se dissimuler. Méfiez-vous des virages masqués, des bancs de neige, des crêtes de pression et de tout autre élément obstruant la vue.
• Dressez les tentes en ligne droite plutôt qu’en cercle et placez-les au moins à 5m d’intervalle.
• Si un ours s’aventure dans le campement, il ne se sentira pas entouré et pourra se sauver sans se sentir menacé.
Ne dormez pas à la belle étoile.
Vous pourriez ressembler à un phoque et les ours polaires sont très curieux. Les gens dormant à la belle étoile se sont déjà fait attaquer.
Filtrez votre eau de vaisselle pour en extraire les particules d’aliments et mettez-les avec les déchets. Jetez l’eau de vaisselle à au moins 50 m de l’endroit où vous dormez, des rivières, des ruisseaux et des lacs. Conservez votre nourriture et vos déchets dans de contenants à l’épreuve des ours ou dans des sacs ou récipients hermétiques déposés sous des roches à un endroit visible de votre tente. Des casseroles placées dessus pourraient servir d’alarme. Si vous avez conçu un système d’avertissement, gardez la nourriture à l’intérieur de cette zone. NE GARDEZ AUCUNE nourriture dans votre tente.
Enterrez les excréments humains sous des roches à au moins 50 m d’où vous dormez ou mettez-les dans des contenants hermétiques.
Autour de votre tente, installez un système d’alarme portatif équipé d’un fil-piège ou d’un détecteur de mouvement pour vous avertir si un ours polaire s’aventure dans votre campement. Avant de partir pour votre séjour, communiquez avec Parcs Canada pour obtenir plus de renseignements à ce sujet.
Vous aimeriez peut-être apporter un chien, mais assurez-vous qu’il est familier avec les ours polaires.
Il est toujours mieux d’avoir plus d’un chien. Attachez-les à un piquet pour qu’ils ne courent pas vers vous lorsqu’ils veulent se faire protéger.
Désignez un veilleur pour signaler toute présence d’ours polaire dans les environs. Songez à déménager votre
campement le cas échéant.
VOUS RENCONTREZ UN OURS
• Assurez-vous que toutes les personnes comprennent ce qu’il faut faire.
• Restez calme et évaluez la situation.
• Que fait l’ours? Quel est son comportement?
Si l’ours ignore votre présence :
• reculez lentement et quittez l’endroit soit en retraçant vos pas soit en faisant un grand détour autour de l’ours. Ne courez pas et ne faites aucun mouvement brusque ou qui pourrait attirer l’attention de l’ours.
• demeurez en aval de l’ours par rapport au vent, si possible, pour qu’il ne puisse pas vous sentir et deviner votre présence
• ne quittez jamais l’ours des yeux.
Si l’ours est conscient de votre présence et montre des signes de curiosité, notamment :
• se déplace lentement en arrêtant souvent;
• se met sur les pattes arrière en humant l’air;
• se tient la tête haute, les oreilles tendues vers l’avant ou le côté;
• se balance la tête de gauche à droite;
• essaye de vous sentir en se mettant en aval par rapport au vent et en vous approchant de derrière;
PRENEZ LES MESURES SUIVANTES :
- aidez-le à comprendre que vous êtes un être humain;
- agitez les bras au-dessus de la tête et parlez d’une voix grave;
- déplacez-vous en amont pour qu’il puisse vous sentir.
Ne vous placez jamais entre une femelle et ses oursons.
Si une femelle accompagnée d’oursons est surprise de près ou si elle en est séparée, il est fort probable qu’elle attaquera afin de les défendre.
• Quittez l’endroit immédiatement.
• Demeurez en groupe.
• Défendez-vous si elle attaque.
Si vous avez surpris l’ours à une faible distance ou s’il se montre agité ou se comporte comme s’il était menacé, notamment :
Restez sur place et soyez prêt à vous défendre!
Il est rare qu’un ours polaire feigne d’attaquer.
Observez si notamment il se met à:
• râler, haleter, siffler, grogner ou laisser claquer ses mâchoires;
• marteler le sol de ses pattes antérieures;
• fixer une personne du regard;
• baisser la tête les oreilles rabattues.
PRENEZ LES MESURES SUIVANTES :
- ne le menacez pas. Ne criez pas et ne faites aucun mouvement brusque qui pourrait provoquer une attaque. Évitez de râler ou de siffler, car cela pourrait inciter l’ours à charger;
- évitez de le regardez directement dans les yeux;
- reculez tranquillement. NE COUREZ PAS;
- soyez prêt à utiliser des moyens de dissuasion.
Si l’ours montre qu’il tente de vous poursuivre ou de vous chasser, notamment :
• vous suivre ou vous encercler;
• vous approcher directement, d’un pas résolu et sans
peur;
• revenir vers vous après que vous l’avez effrayé;
• ou s’il paraît blessé, vieux ou maigre;
PRENEZ LES MESURES SUIVANTES :
- défendez-vous! Utilisez n’importe quel objet qui pourrait servir d’arme, regroupez-vous et faites beaucoup de bruit;
- NE COUREZ PAS;
- soyez prêt à utiliser des moyens de dissuasion.
Songez à utiliser tout objet pouvant servir d’arme, tel que des skis, des bâtons, des blocs de glace ou même des couteaux.
Demeurez en groupe. En restant en groupe et en posant certains gestes, tels que faire du bruit, sauter, agiter les bras et lancer des objets, il est possible d’intimider un ours et de le faire partir.
SE DEFENDRE
Dans les parcs nationaux du Canada, il est illégal de porter une arme à feu sans permis. Seules les personnes visées par la Convention définitive des Inuvialuit et par l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut peuvent se soustraire à ce règlement; elles peuvent porter des armes à feu lorsqu’elles participent à des activités traditionnelles dans les parcs nationaux se trouvant dans la région faisant l’objet des revendications territoriales.
Des produits anti-ours non mortels ont été conçus pour se protéger contre les ours noirs et les grizzlis, mais leur efficacité n’a pas encore été prouvée dans le cas des ours polaires.
Par conséquent, on ne peut en dépendre pour se protéger. Le meilleur moyen d’être en sécurité c’est d’éviter tout contact avec les ours polaires.
Songez à utiliser tout objet pouvant servir d’arme.
Assurez-vous de toujours laisser une voie de sortie à l’ours.
Portez des produits anti-ours sur vous et sachez les utiliser.
Produits anti-ours commerciaux :
• Les avertisseurs, notamment les avertisseurs pneumatiques et les avertisseurs sonores de type pistolet ou avec dispositif de lancement en forme de stylo, peuvent effrayer un ours.
• Le gaz poivré pourrait être efficace sur les ours polaires, mais il n’a pas encore fait l’objet d’essais approfondis. Sachez que par temps froid, le gaz poivré n’est pas efficace. Si vous vous en servez, soyez conscient de la direction du vent pour éviter que le gaz ne vous revienne dans la figure.
BONNE VISITE
Un mystère sur Mars ?
Cette image (réelle) venue de l'espace fait beaucoup jaser. De quoi ce trop parfait point noir est-il l'étrange produit ? Serait-ce le début d'un remake de "2001, l'Odyssée de l'espace". Une blague de martiens ? Un vaisseau publicitaire ? Au passage j'aime l'effet que crée cette image spatiale rigide et désaxée sur cette page. (A SUIVRE)
17.6.07
Le "Traversé par la vie"
Il y a des mots qui ouvrent le ciel et la terre. "Se laisser traverser par la vie" fait partie de ces expressions qui sont capables de surgir dans mes rêves et de me tirer du sommeil pour une douce méditation. "Traversé par la vie" est encore venu s'emparer de moi l'autre soir comme une amie comédienne interprétait sur scène, offerte et fragile, troublante comme un reflet. Les bras écartés, elle jouait. Et j'entendais sa voix venir de la petite fille qu'elle fut, sans digue aucune. Elle se livrait à nous. La comedia lui permettait de tomber le masque.
photo
Comment peindre cela ? C'est assez voisin de "lâcher prise", le jeu auquel on se livre, gamins, pendant les heures de piscine. On lâche le carrelage du bord. On se laisse sombrer. L'eau se referme sur soi. On retient son souffle. On ouvre les yeux, dans le bleu de l'eau où les lumières lointaines font des mirages, et les sons des bulles assourdies. On attend. Que se passerait-il si on se laissait encore plus aller ? Si l'on demeurait sur cette planète-là ? Jusqu'où l'exercice est-il doux ? Et quand surgit la douleur ? Est-ce vraiment de la douleur ? Et si l'on quittait la scène de sa propre vie ? Les autres seraient-ils tristes ? Plus d'air. Je remonte.
Ces jeux d'enfant sont lointains, mais leurs résultats sont en nous. La force qui résulte de la réponse que nous leur avons fabriquée. La faiblesse, aussi, car cette fragilité nous remet sans fin entre nos propres mains. Je veux vous raconter que le "traversé par la vie" m'est revenue aussi, l'autre jour, comme je recevais des Editions Odile Jacob le guide de Pascale This.
Pascale est l'épouse d'Hervé, un camarade scientifique et gastronome dont j'ai déjà vanté la tendre et brillante folie ici, et sur lequel je reviendrai, dès qu'une envie de salé/sucré me reprendra. Pascale c'est différent. Endocrinologue, gynécologue, elle a participé à la mise sur pied en milieu hospitalier d'un "centre de la femme". Je vais restreindre mes éloges, car vous n'y croiriez pas, tant cette femme a consacré sa vie à son labeur et à son exigence d'être utile. Son bouquin : "Le guide de la femme de 40 ans" annonce ce qu'il va explorer : "les bons choix, les traitements". Mais en le feuilletant (Le Guide de la Femme après 40 ans. Dr Pascale This. Odile Jacob. 27e.), avec ma maladie de tout explorer, savez-vous ce que j'ai pris en ma pleine figure de mâle quadra ?
Un "traversé par la vie". Oui : la fragilité muette avec laquelle les femmes traversent les années.
On ici et là parlé des ces histoire d'hormones, d'effets secondaires des traitements de substitution. "Comment lire cette phrase parue dans un quotidien : "le risque de cancer du sein augmente de 30 % sous traitement hormonal de la ménopause", ? Faut-il en conclure qu'il passe de 12 % (moyenne nationale) à 30 % , ou pire encore, à 42 %", demande Pascale. A quoi servent des chiffres incompréhensibles ou trompeurs ?
Je me suis soudain souvenu que j'avais, il y a quelques années, passé des jours dans un service de cancérologie. J'étais ressorti de là pantois. Tant de courage, mais aussi de si épais et maladroits silences. J'ai vu de jeunes médecins trembler bien davantage que l'ombre féminine à laquelle ils portaient la mauvaise nouvelle sans regarder les yeux. Esquiver les question avec toute la mauvaise foi de la panoplie technique et médicale, puis tourner les talons.
Ce qui m'a frappé, dans ce livre, c'est que Pascale prend les deux voies/voix : celle de la femme qui interroge, et celle (le médecin) qui tente de répondre, en science et conscience. Sans nier le danger ni se protéger. Une femme qui parle aux femmes. Pourquoi n'est cela pas la norme ? Peur de se répandre ? Peur de montrer sa propre fragilité ? Peur de soi ?
Ce que je voulais ajouter, en un autre boomerang, c'est cette autre petite anecdote vécue : "jeune" journaliste on m'a un jour commandé une enquète sur la médecine de l'andropause. Et me voici, blouse blanche et stetoscope dans la poche, camouflé en stagiaire, dans la consultation d'un grand ponte de "zizilogie", bronzé, sourire impec, obscène gourmette en or au poignet.
En regardant ces messieurs inquiets des signes de leur impuissance, paniqués de ce que cette mollesse disait de leur âge, et qui venaient là se faire implanter tuteurs, systèmes de gonflage ou petits robinets, j'ai senti, là encore, combien on refoulait le "laisser traverser par la vie".
Lui non plus, docteur zizi, ne rassurait personne. Il ne les entendait même plus, à force de se protéger, qui disaient, entre leurs mots : "dites, docteur c'est déjà la fin ? Si je ne puis plus faire du bien aux femmes, c'est que je suis sur la grande pente ?" Non. Rien. Lorsqu'il les sentait trop inquiets, il leur faisait une piqûre dans la verge, et les envoyait distiller leur raideur devant un film cochon, dans la petite salle aménagée à cet effet.
Au nom de toute ces prétextes de pudeur, on finit seuls. "Entre les murs". Traversons les.
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Comment peindre cela ? C'est assez voisin de "lâcher prise", le jeu auquel on se livre, gamins, pendant les heures de piscine. On lâche le carrelage du bord. On se laisse sombrer. L'eau se referme sur soi. On retient son souffle. On ouvre les yeux, dans le bleu de l'eau où les lumières lointaines font des mirages, et les sons des bulles assourdies. On attend. Que se passerait-il si on se laissait encore plus aller ? Si l'on demeurait sur cette planète-là ? Jusqu'où l'exercice est-il doux ? Et quand surgit la douleur ? Est-ce vraiment de la douleur ? Et si l'on quittait la scène de sa propre vie ? Les autres seraient-ils tristes ? Plus d'air. Je remonte.
Ces jeux d'enfant sont lointains, mais leurs résultats sont en nous. La force qui résulte de la réponse que nous leur avons fabriquée. La faiblesse, aussi, car cette fragilité nous remet sans fin entre nos propres mains. Je veux vous raconter que le "traversé par la vie" m'est revenue aussi, l'autre jour, comme je recevais des Editions Odile Jacob le guide de Pascale This.
Pascale est l'épouse d'Hervé, un camarade scientifique et gastronome dont j'ai déjà vanté la tendre et brillante folie ici, et sur lequel je reviendrai, dès qu'une envie de salé/sucré me reprendra. Pascale c'est différent. Endocrinologue, gynécologue, elle a participé à la mise sur pied en milieu hospitalier d'un "centre de la femme". Je vais restreindre mes éloges, car vous n'y croiriez pas, tant cette femme a consacré sa vie à son labeur et à son exigence d'être utile. Son bouquin : "Le guide de la femme de 40 ans" annonce ce qu'il va explorer : "les bons choix, les traitements". Mais en le feuilletant (Le Guide de la Femme après 40 ans. Dr Pascale This. Odile Jacob. 27e.), avec ma maladie de tout explorer, savez-vous ce que j'ai pris en ma pleine figure de mâle quadra ?
Un "traversé par la vie". Oui : la fragilité muette avec laquelle les femmes traversent les années.
On ici et là parlé des ces histoire d'hormones, d'effets secondaires des traitements de substitution. "Comment lire cette phrase parue dans un quotidien : "le risque de cancer du sein augmente de 30 % sous traitement hormonal de la ménopause", ? Faut-il en conclure qu'il passe de 12 % (moyenne nationale) à 30 % , ou pire encore, à 42 %", demande Pascale. A quoi servent des chiffres incompréhensibles ou trompeurs ?
Je me suis soudain souvenu que j'avais, il y a quelques années, passé des jours dans un service de cancérologie. J'étais ressorti de là pantois. Tant de courage, mais aussi de si épais et maladroits silences. J'ai vu de jeunes médecins trembler bien davantage que l'ombre féminine à laquelle ils portaient la mauvaise nouvelle sans regarder les yeux. Esquiver les question avec toute la mauvaise foi de la panoplie technique et médicale, puis tourner les talons.
Ce qui m'a frappé, dans ce livre, c'est que Pascale prend les deux voies/voix : celle de la femme qui interroge, et celle (le médecin) qui tente de répondre, en science et conscience. Sans nier le danger ni se protéger. Une femme qui parle aux femmes. Pourquoi n'est cela pas la norme ? Peur de se répandre ? Peur de montrer sa propre fragilité ? Peur de soi ?
Ce que je voulais ajouter, en un autre boomerang, c'est cette autre petite anecdote vécue : "jeune" journaliste on m'a un jour commandé une enquète sur la médecine de l'andropause. Et me voici, blouse blanche et stetoscope dans la poche, camouflé en stagiaire, dans la consultation d'un grand ponte de "zizilogie", bronzé, sourire impec, obscène gourmette en or au poignet.
En regardant ces messieurs inquiets des signes de leur impuissance, paniqués de ce que cette mollesse disait de leur âge, et qui venaient là se faire implanter tuteurs, systèmes de gonflage ou petits robinets, j'ai senti, là encore, combien on refoulait le "laisser traverser par la vie".
Lui non plus, docteur zizi, ne rassurait personne. Il ne les entendait même plus, à force de se protéger, qui disaient, entre leurs mots : "dites, docteur c'est déjà la fin ? Si je ne puis plus faire du bien aux femmes, c'est que je suis sur la grande pente ?" Non. Rien. Lorsqu'il les sentait trop inquiets, il leur faisait une piqûre dans la verge, et les envoyait distiller leur raideur devant un film cochon, dans la petite salle aménagée à cet effet.
Au nom de toute ces prétextes de pudeur, on finit seuls. "Entre les murs". Traversons les.
Revue de PRESSE et critiques LECTEURS (blog et roman)
2009 : les droits acquis en Italie...
En octobre, dans La promotion des lettres (Belgique)
Mail d'un lecteur (inconnu), en octobre :
Bonjour! Pas de long discours, pas de phrases ampoulées "z'et" chiantes... deux mots simples pour exprimer, au plus juste, le plaisir ressenti à la lecture de votre roman "Le complot des papillons"... Le meilleur roman français que j'ai eu l'occasion de lire depuis le "Val Paradis" d'Alain Jaubert...
Bravo! et Merci!
Christian
Le roman, le 25 Juin 2007, sur le site culturel EVENE
par Emilie Vitel
Quand ils sortent des sentiers battus, les voyages sont le plus souvent édifiants. Mais lorqu’ils perdent tout lien tangible avec la réalité, ils peuvent s’avérer sans retour. Les premières pages du ‘Complot des papillons’ nous plongent dans le doute : trop bien écrit, trop structuré, le récit ne serait-il qu’un brillant exercice de style ? Mais rapidement, Patrice Lanoy démontre qu’il ne met pas les formes pour occulter la faiblesse du fond, et ferre son lecteur dont la curiosité croît à mesure que l’intrigue grossit. Maniant l’art de la rhétorique avec maestria, l’auteur se régale des subtilités de la langue et signe un récit intense, couronné d’une montée dramatique constante.
Quelque part entre catharsis et récit initiatique, ‘Le Complot des papillons’ nous touche par la sincérité qu’il dégage, mais aussi par la pudeur dont fait preuve Patrice Lanoy, qui se positionne tant en observateur qu’en protecteur de ses personnages, qu’il caresse de sa plume jusqu’à les rendre presque trop humains pour pouvoir être réels. Alors que le sort s’acharne, ces derniers n’ont de cesse de lutter pour la vie. Et si la fin tombe un peu à plat et ne répond pas à toutes nos questions, l’optimisme qui se dégage du ‘Complot des papillons’ suffit amplement à balayer toute réticence. Un premier roman brillant, porteur d’un espoir essentiel.
Le 25 juin toujours, en direct, interview (le roman) dans l'émission de Mathieu Vidard, "La tête au carré" (France Inter)
Le 25 juin, à propos du blog et du roman, cet article dans le Journal de l'Innovation
Blog : Quand la science se colore de poésie
Sur son blog, Patrice Lanoy mêle questions scientifiques, réflexions philosophiques et poésie.
Lancé en février dernier, le blog « Le complot des papillons » de Patrice Lanoy, ancien journaliste scientifique au Figaro et romancier, propose des centaines de billets mêlant questions scientifiques, réflexions philosophiques, littérature… et poésie. En l’espace de quatre mois seulement, 10 000 internautes sont venus s’informer, réfléchir et voyager grâce à ces écrits scientifiques d’un nouveau genre.
« Peut-on avoir des illusions temporelles ? Etre persuadé que quelque chose s’est produit avant que nous n’agissions ? Lorsque j’ai éteint la lumière de ma lampe de chevet, hier soir, j’ai eu la nette et trouble "’impression" de voir la lumière s’éteindre bien AVANT que je ne tire la ficelle qui actionne l’interrupteur de la petite lampe japonaise. » C’est en se basant sur des expériences de la vie courante, des textes littéraires ou des interrogations d’internautes, que Patrice Lanoy, ancien journaliste scientifique au Figaro, a choisi de traiter, tout en poésie, des questions scientifiques, sur son blog "le complot des papillons" (du même tire que son roman récemment paru (1)). Si la démarche est originale, elle n’en est pas moins très sérieuse : pour répondre à ces interrogations, l’ancien journaliste enquête et s’appuie sur des publications scientifiques pour transmettre les informations récoltées dans un style littéraire. « J’ai toujours souhaité casser la barrière qui existait entre la science et l’art, la littérature, la philosophie et la poésie, car le désir premier d’un scientifique tient dans le plaisir de changer son point de vue sur le monde » explique Patrice Lanoy.
Littérature, sciences et voyages
Sur son blog qu’il qualife de « laboratoire d’écriture de littérature, sciences et voyages », l’internaute peut accéder à des centaines de billets aussi divers que « Les autistes sont-ils ailleurs ? Le Terrien est-il immortel ? Quel est le secret d’une ombre ? Les femmes sont-elles des hommes comme les autres ?… ». Et ces écrits poético-scientifiques d’un nouveau genre connaissent un grand succès : en l’espace de quatre mois seulement, 10 000 internautes sont venus visiter le blog ! Et les prochains sujets que pensent traiter l’auteur devraient attirer encore quelques visiteurs de plus : « Je souhaite, par exemple, écrire un texte intitulé « Comment les éléphants se saoulent-ils ? » et un autre sur les plus gros contresens qu’ont réalisés les anthropologues sur les peuples premiers ». Déjà, certains éditeurs ont proposé à l’auteur d’adapter le contenu de son blog à un livre et une radio l’a sollicité pour animer régulièrement une émission.
25 juin 2007, Anna Musso
(1) Patrice Lanoy, Le complot des papillons, Editions du Seuil, 2007, Paris, 16 euros
Patrick Poivre d'ARVOR (ROMAN)
(LCi-TF1, le 12 mai) :
Mon coup de coeur de la semaine, je vous recommande : "Le complot des papillons" de Patrice Lanoy...
Catherine VINCENT (BLOG et ROMAN)
(Le MONDE et Le Monde.fr, le 15 juin)
Combien de personnes faut-il réunir pour avoir une chance raisonnable que deux invités fêtent leur anniversaire le même jour ? Comment expliquer que 96 % de l'univers soient invisibles ? Les femmes sont-elles des hommes comme les autres ? La notion de gène se prête-t-elle à la simplification que veut lui faire subir le débat politique ? C'est à réfléchir, rêver ou s'informer sur ces sujets - et beaucoup d'autres - que nous convie le blog de Patrice Lanoy, inauguré en février 2007 et riche, à ce jour, de près d'une centaine de billets.
Des thèmes à consonance plutôt scientifique, noterez-vous ? Normal : son auteur, avant de devenir "écrivain, voyageur, navigateur", était journaliste scientifique. Il l'est un peu resté. Suffisamment pour entraîner l'internaute sur des mers peu explorées, avec une maîtrise solidement étayée par la connaissance du métier. Mais plus assez pour résister à l'envie de faire des ronds dans l'eau et des embardées de gamin, profitant avec gourmandise de la liberté qu'offre la Toile.
Paradoxes logiques et jeux mathématiques, coups de coeur littéraires, méditations inspirées par l'actualité ou l'observation du monde, hommage vibrant et inédit au physicien Pierre-Gilles de Gennes, disparu le mois dernier : rien de mieux sur ce site que de piocher au hasard pour naviguer avec bonheur entre science, art et société.
HUMOUR ET POÉSIE
D'un simple clic, on passera ainsi de la survie des arbres millénaires aux phénomènes aérospatiaux non identifiés (les données du Centre national d'études spatiales relatives aux ovnis ont été mises en ligne il y a quelques semaines). De la fonte des glaces au cas de l'Américain John Forbes Nash, génie à 20 ans, puis schizophrène et Prix Nobel d'économie. Du monstre du Loch Ness aux lois d'Asimov sur la robotique. D'une rencontre avec Edgar Morin au plaisir très parisien d'une place à 5 euros à l'Opéra Bastille...
Un blog, "c'est pouvoir passer de la matière manquante du cosmos à la salade de fruits, et hop, sans prévenir le moindre électron", affirme ce gai luron de la science. Et de fait : entre l'architecture islamique et les quasi-cristaux, entre les vicissitudes de l'informatique et la physique de la tartine beurrée, les rapprochements sont parfois osés.
Toujours surprenant, souvent empreint d'humour et de poésie, ce blog atypique, décrit par son auteur comme une "promenade entre les mots, les atomes et les âmes", porte pour joli nom "Le complot des papillons". C'est aussi le titre du premier roman que Patrice Lanoy vient de publier au Seuil (200 p., 16 euros), dont il fait sur son site - c'est de bonne guerre - l'autopromotion. Du blog au livre, il donne envie de passer le pas.
Nicole Van de KERCHOVE (ROMAN)
(navigatrice et écrivain)
"Le Complot des Papillons"
On rentre dans l'histoire comme on aborde une mer calme, mais au fur et à mesure du récit, on tourne les pages de plus en plus vite. Jusqu'à la dernière qui vous laisse là avec des yeux mouillés et le cœur qui bat.
Il ne reste plus qu'à tout relire pour savourer le texte, et relire encore pour toutes ces phrases qui viennent chatouiller le cœur. Mon libraire a levé le sourcil lors de ma dernière visite : je les achète par deux ! Impossible de ne pas avoir envie de partager "Le Complot des Papillons" avec les gens que l'on aime.
Marie-Odile MONCHICOURT (ROMAN)
(Sur France-Info, le 12 juin, INFOS-SCIENCES)
A "vu" que le roman parlait de science, sous ses aspects poétiques. Que l'accélération du rythme du livre était celui de nos vies qui passent et de l'Univers. Entretien sur le thème temps du cosmos (1'30) et les supernovas, pour présenter le roman et le thème du temps.
Patrick CHOMPRE (ROMAN)
(RFI, LES VISITEURS DU JOUR, le 7 juin. Invité : 20' entretien en direct)
"Le roman de philosophie et de science, à travers les grands espaces, dont on parle en ce moment..."
Laurent LEMIRE (ROMAN)
(Nouvel Observateur + Esprits Libres (Guillaume Durand, France2) :
Parmi les voyages, il y a ceux qui vous font aller plus loin que prévu. C’est à ce périple que nous invite Patrice Lanoy dans un premier roman envoûtant. Dans « Le complot des papillons », nous suivons trois personnages sur un bateau, un homme, une adolescente, un autiste ; trois personnages en quête d’eux-mêmes, à la dérive sur un même univers, pris au piège de leur destin. Mais attention, le destin, ça se fabrique nous rappelle Loïc le marin, l’homme qui a perdu sa femme et qui rame pour ne pas perdre sa tête sur ce fragile esquif. « Ce qui fabrique nos vies ce sont les hordes de décisions et d’action imperceptibles qui peuplent le plus ordinaire de nos journées.
Ce sont les choses invisibles et légères qui peu à peu tissent ou défont la trame de l’Essentiel. » Bref il suffit d’un battement d’ailes de papillon, d’une invitation à une sortie en mer, d’un moteur qui casse et d’une dérive sans fin. Le récit joue avec subtilité sur les formes, sur ce que l’on voit ou que l’on croit voir. D’ailleurs le voilier s’appelle Morpho, du nom d’un grand papillon bleu à l’éclat changeant. Et c’est ainsi qu’avec un beau culot de voyageur qui ne se refuse rien, Patrice Lanoy, marin lui-même, transforme un naufrage en traversée poétique et spirituelle d’où la science n’est pas absente. Pour le vérifier, vous n’avez plus, à bord du Morpho, qu’à larguer les amarres…
Isabelle BRISSON (ROMAN) :
Dans le FIGARO, cet article paru le 28 mai 2007 :
En astrophysicien délirant, Loïc embarque sur son voilier Klara, une adolescente brutale et son cousin Sol qui est autiste. À bord du Morpho, de la couleur illusion des papillons sud-américains, une dérive va commencer... Qu’est-ce qui fait que l’on s’intéresse au monde ou pas ? Voilà la question que Patrice Lanoy s’est posée et qu’il essaie de dénouer de façon poétique, philosophique et scientifique. Pour l’auteur, Le Complot des papillons c’est ce millier de choses invisibles et légères qui peu à peu tissent et défont la trame de l’essentiel et qui préparent les bonheurs et les peines. Comme disait Einstein, le temps que l’on croit si important n’est en fait rien d’autre que notre illusion de la vie. Einstein nous tirait la langue parce qu’il avait compris cela et n’était pas écouté, il nous parlait de l’infini et tout le monde n’y a vu que des maths. Pourtant, comme le rappelle Patrice Lanoy, dans la réalité les enfants commencent à éprouver de la curiosité pour le monde entre six mois et un an. Loïc son personnage réalisera ainsi, peu à peu, qu’il existe d’autres sensibilités. Et entreprendra un parcours inverse. De quoi nous tirer des larmes d’émotion, en refermant le livre.
Michel LITOUT (ROMAN):
(Centre Presse (gros article dans l'édition papier, 24 mai), en ligne sur ce site internet)
"..un très beau texte, entre paranoïa et réflexion philosophique, entre violence et découverte de soi et de l'autre."
Sur le site labosonic (BLOG)
"En ces temps où l'intelligence et l'humour volent bas sur le web, j'ai découvert deux liens indispensables qui vous réconcilieront chacun à leur manière avec la toile :
- Le complot des papillons, blog du même nom que le livre qui vient de paraître, est écrit par Patrice Lanoy. Chacun de ses billets est une merveille d'écriture qui mêle poésie (parfois), pédagogie (toujours) et science (évidemment). C'est probablement le meilleur moyen de se cultiver en douceur, surtout quand on y connaît rien dans ce domaine car les sujets sont légers sans être stupides. Ca change de beaucoup de ses confrères qui pensent que seule la sexualité des animaux est digne d'intérêt pour faire de la vulgarisation scientifique. Profitez-en de suite, tant que son compteur de visites est bas, ça vous permettra de frimer plus tard, dans six mois tout au plus, quand il sera devenu un des points cardinaux du web francophone. Pour information, ma rose des vents personnelle de la culture sur les blogs le placerait au sud tandis qu'au nord on trouverait Pierre Assouline, à l'Est, André Rouillé et à l'Ouest Eric Roux (parce que la cuisine, c'est encore et toujours de la culture)."
Isabelle PLAT (ROMAN):
(artiste plasticienne, depuis... New York)
Hier après midi, je suis parti en bateau avec Loïc, Klara et Sol pour un voyage non-stop et sans escale. Cela
faisait des années que je n’avais pas lu un livre d’une traite…
Huit mois, j’aurai pu continuer, (de plus, alors que je n’ai même jamais peu pratiquer le pédalo ni même la
balançoire pour raison de mal de mer tout c’est bien passé, pour moi du moins, sur le Morpho). Grâce au
Complot des papillons, ma première journée à NY, attribuée comme vacances fut donc remplie de poésie…
Isabelle
Sure le site Quinquabelle (BLOG)
Blog à adopter : http://lecomplotdespapillons.blogspot.com/
Le nom même de ce blog est jubilatoire..J'ai découvert ces " papillons" à travers un article sur internet . N'écoutant que ma curiosité et ma gourmandise de savoirs , j'ai plongé dans le vol de papillons et en suis ressortie avec le sourire .
Voilà un blog comme je les aime , papillonnant au gré des interrogations de l'auteur , passant sans remords de l'autisme aux aboiement des chiens..avec sérieux et humour .
Comme le chante Philippe Katerine :" j'adooooooooore" :-)
J'espère que - tout comme moi - vous adopterez ce blog et cet homme :Patrice Lanoy !
Georges CHAPOUTHIER (ROMAN):
(directeur de recherche au CNRS, anime une équipe de l’unité mixte de recherche sur la vulnérabilité, l’adaptation et la psychopathologie à l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière)
Ce livre m'a beaucoup intéressé, et pas seulement parce que ma quatrtième enfant souffre d'une forme d'autisme. C'est un texte très poétique et je tenterai d'en dire un mot, dans quelques mois, dans une revue de poésie (je m'intéresse à ce domaine). La fin, surprenante, gomme et explique toutes les interrogations que l'on rencontre durant le voyage en mer. Tant il est vrai que les voyages intérieurs sont les plus violents. Avec des scènes inoubliables, comme la tempête ou cette île... J'attends le prochain avec impatience.
Georges
Alain GILLIS :
(psychiatre, psychanalyste, directeur de l'Institut Médico Educatif Michel de Montaigne de Chelles)
Il ne s’agit ni d’un réalisme à la Zola, ni d’un dessein Balzacien, mais d’un roman lyrique, allant d’une appréhension immédiatement poétique de la réalité à une autre appréhension, celle qui s’élabore, aux confins d’un savoir scientifique qui s’enrichit de tous les doutes, qui se plait à chanter ses limites. Nous ne pouvons savoir, et c’est très bien ainsi. Racine de 2 ! Et tout est dit. Ce qu’on pourrait dire, c’est la confrontation poétique entre le réel immédiat du bateau perdu au sein d’un réel vaste, évoqué en poète… Mais en poète qui serait ce qui reste du savant quand il ne prétend plus à la saisie du vrai. De beaux instants d’écriture forte. Des métaphores nombreuses et justes. Des raccourcis heureux. La couverture tendre est trompeuse et c’est mieux ainsi.
Alain
(sur Amazon.com) (ROMAN) :
De la première à la dernière ligne, le complot des papillons emmène le lecteur dans une aventure grandeur nature.
L'histoire est intense et bien écrite, jamais on ne s'ennuie et les personnages sont d'une richesse intriguante!
Je recommande vivement ce roman à tous ceux qui souhaitent sentir la houle et le vent dans leur cheveux!
Longue vie aux papillons.
Mich "FM"
Francis JALUZOT (ROMAN)
(Directeur-fondateur d'un groupe de presse)
Le Complot des Papillons fait partie des livres que j'ai lu en quelques jours (un week-end je crois). Je lis tous les jours, les livres me quittent rarement mais généralement je mets plusieurs semaines à lire un livre.
Si je l'ai lu aussi vite c'est que cette histoire m'a entraîné : curiosité de connaître la scène suivante, envie de connaître le destin des personnages. Intrigué par ce huit clos, ces trois âmes aussi étranges qu'improbables. J'ai été aussi envoûté par ce bateau, véritable héro du livre, selon moi. Emporté par ces tempêtes criantes de vérité qui m'ont emmené loin de la réalité, loin du quotidien.
Francis
Nathalie W
"Si vous avez envie de prendre le large à la dérive, une petite brise marine dans ce monde de brute, des rencontres inattendues : un certain container, un miracle : un autiste qui s’éveille à notre monde , et dans l’attente bercé par les flots : un peu de philo.
Mais pourquoi le complot des papillons, vous le découvrirez dans ce livre."
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